BIC - Plus-values et moins-values - Plus-values et moins-values du portefeuille-titres - Cession des titres du portefeuille - Dispositions particulières aux opérations de transmission à titre gratuit au profit d’un fonds de pérennité
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L'article 177 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises crée le fonds de pérennité, entité constituée par l’apport gratuit et irrévocable des titres de capital ou de parts sociales d’une ou de plusieurs sociétés exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole, ou détenant directement ou indirectement des participations dans une ou plusieurs sociétés exerçant une telle activité, réalisé par un ou plusieurs fondateurs afin que ce fonds gère ces titres ou parts, exerce les droits qui y sont attachés et utilise ses ressources dans le but de contribuer à la pérennité économique de cette ou de ces sociétés et puisse réaliser ou financer des œuvres ou missions d’intérêt général.
Ainsi, l’entreprise qui le souhaite a la possibilité de transmettre à titre gratuit des droits sociaux répondant aux conditions prévues par l’article 177 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, afin de constituer un fonds de pérennité.
En principe, conformément aux dispositions du 1 de l’article 38 du code général des impôts (CGI), la transmission à titre gratuit d’un élément de l’actif immobilisé par une entreprise constitue une cession donnant lieu à la constatation d’une plus ou moins-value. Pour plus de précisions sur la donation d’éléments de l’actif, il convient de se reporter au II-F § 440 du BOI-BIC-PVMV-10-10-20.
Remarque : L’apport gratuit et irrévocable des titres de capital ou de parts sociales qui constitue la dotation du fonds de pérennité est transcrit comptablement au niveau du fonds directement dans un compte de capital (compte 102 « Apport au fonds de pérennité ») sans constatation d’un produit. L’apport initial ne se traduisant pas non plus par une variation d’actif net entre la clôture et l’ouverture du premier exercice du fonds de pérennité, il ne constitue pas un bénéfice imposable pour le fonds de pérennité.
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Toutefois, le 7 quater de l'article 38 du CGI dispose que la plus ou moins-value résultant de la transmission à titre gratuit et irrévocable de titres de capital ou de parts sociales à un fonds de pérennité lors de sa constitution est comprise dans son résultat au titre de l'exercice au cours duquel ces titres ou parts sont ultérieurement cédés.
La plus ou moins-value résultant de la cession ultérieure des titres de capital ou parts sociales ainsi transmis est déterminée par rapport à la valeur que ces titres ou parts avaient du point de vue fiscal à la date de la transmission.
Les dispositions de l'article 14 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 s’appliquent aux transmissions réalisées à compter de l’entrée en vigueur de l’article 177 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 intervenue à la date de publication du décret n° 2020-537 du 7 mai 2020 relatif aux fonds de pérennité.
I. Champ d'application du sursis
A. Personnes concernées
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Le sursis d'imposition prévu au 7 quater de l'article 38 du CGI s'applique à la transmission de titres de capital ou de parts sociales réalisée par toute entreprise relevant de l’impôt sur le revenu ou passible de l’impôt sur les sociétés, quel que soit son régime d’imposition.
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Le sursis d’imposition ne concerne que les transmissions réalisées au profit d’un fonds de pérennité tel que défini par l’article 177 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019. Le fonds de pérennité ainsi constitué jouit de la personnalité morale.
Il est précisé que le fonds de pérennité assure la gestion des titres de capital et parts sociales constituant sa dotation et bénéficie ainsi des ressources lui permettant de financer les activités prévues par ses statuts afin de contribuer à la pérennité économique des sociétés dont les titres lui ont été transmis et de réaliser des activités d’intérêt général. En tant que tel, le fonds de pérennité est soumis à l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun, en application du 1 de l'article 206 du CGI qui vise les personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif. Pour plus de précisions sur les organismes privés autres que les sociétés, il convient de se reporter au BOI-IS-CHAMP-10-50.
B. Opérations concernées
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Les opérations susceptibles de bénéficier du sursis d’imposition sont les transmissions réalisées à titre gratuit et de manière irrévocable. La transmission à titre gratuit se distingue notamment de l’échange en tant qu'elle est réalisée sans contrepartie au profit de l'entreprise qui la consent. L'appréciation du caractère irrévocable de la transmission suit les principes découlant de l'article 894 du code civil (C. civ). En ce sens, la transmission doit constituer un dessaisissement définitif de la part de l'entreprise qui réalise la transmission.
Il est précisé que l’article 177 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 ne prévoit pas de droit de retour des biens dans le patrimoine de l’entreprise qui a consenti la transmission en cas de dissolution du fonds de pérennité.
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Les transmissions concernées par les dispositions du 7 quater de l’article 38 du CGI sont uniquement celles réalisées à l’occasion de la constitution du fonds de pérennité. Elles permettent ainsi au fonds de constituer sa dotation initiale. Les transmissions ultérieures de titres ne bénéficient donc pas du sursis et emportent toutes les conséquences d’une cession à titre gratuit (§ 1).
C. Titres concernés
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Conformément aux dispositions de l’article 177 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, la dotation du fonds de pérennité est constituée, lors de sa création, de titres de capital ou de parts sociales d’une ou plusieurs sociétés exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole, ou détenant directement ou indirectement des participations dans une société exerçant une telle activité.
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Le fonds de pérennité peut également recevoir des biens et droits de toute nature qui entrent dans la composition de sa dotation. Ces biens et droits sont exclus du bénéfice du sursis prévu au 7 quater de l’article 38 du CGI. Il en est ainsi, notamment, des biens immobiliers ou de dotations en numéraire. Dans ce cas, la transmission concernée suit le régime fiscal des donations d’éléments de l’actif. Pour plus de précisions sur les donations d’éléments d’actif il convient de se reporter au II-F § 440 du BOI-BIC-PVMV-10-10-20.
Il est précisé que l’entreprise qui procède à la transmission à titre gratuit de tels biens ou droits doit être en mesure de justifier qu’une telle opération s’inscrit dans le cadre d’une gestion normale. Pour plus de précisions sur la notion d’acte anormal de gestion, il convient de se reporter au BOI-BIC-CHG-10-10-20.
II. Effets du sursis d'imposition
A. Neutralité fiscale de l'opération bénéficiant du sursis d'imposition
1. Non prise en compte de la plus ou moins-value afférente à la transmission des titres dans le résultat de l’entreprise réalisant l’opération
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En principe, la transmission à titre gratuit de titres de capital ou de parts sociales détenus par une entreprise emporte les conséquences d’une cession et entraîne la constatation d’une plus ou moins-value de cession prise en compte dans le résultat fiscal de l’entreprise qui la réalise.
Toutefois, lorsque les conditions prévues au 7 quater de l'article 38 du CGI sont réunies (notamment l'engagement dont les modalités sont détaillées au II-A-2 § 110), la transmission des titres en vue de la constitution d’un fonds de pérennité est neutre sur le résultat fiscal de l’entreprise qui réalise la transmission. La plus ou moins-value résultant de la transmission des titres est placée en sursis jusqu’à leur cession ultérieure.
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La transmission de titres à un fonds de pérennité ne remet pas en cause le régime de faveur prévu au 7 bis de l’article 38 du CGI, à l'article 210 A du CGI et à l'article 210 B du CGI sous lequel ils ont été, le cas échéant, antérieurement reçus. Le sursis d'imposition prévu à l'article 7 quater de l'article 38 du CGI se combine avec ceux prévus à l'article 210 A du CGI et à l'article 210 B du CGI, sous réserve du respect des conditions d'application propres à chacun de ces régimes.
Ainsi, lorsque les titres ont été précédemment échangés ou reçus dans le cadre d'une fusion, d'une scission ou d'un apport partiel d'actif placé sous le régime fiscal de faveur, la valeur fiscale des titres transmis correspond à la valeur fiscale d’origine de ces titres résultant de l’opération d’échange, de fusion, de scission ou d’apport partiel d’actifs.
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Dans le cas où les titres transmis font l’objet de provisions pour dépréciation, la transmission entraîne la reprise de celles-ci par l’entreprise qui réalise la transmission, à hauteur de la quote-part correspondant aux titres transmis.
2. Engagement du fonds de pérennité
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Le 7 quater de l'article 38 du CGI prévoit qu'en cas transmission à titre gratuit et irrévocable de titres en vue de la création d’un fonds de pérennité, la plus ou moins-value résultant de cette transmission est placée en sursis d’imposition lorsque le fonds de pérennité prend l’engagement de calculer la plus ou moins-value de cession ultérieure des titres, d’après la valeur fiscale que ces titres avaient du point de vue de l’entreprise ayant réalisé la transmission.
Cet engagement est librement formulé par le fonds de pérennité à la date de l’opération de transmission et transmis au service des impôts des entreprises compétent au plus tard à la date de clôture de l’exercice au titre duquel la transmission est intervenue. Cette date s’entend de celle de clôture de l’exercice de l’entreprise ayant réalisé la transmission.
À défaut d’une formulation expresse de cet engagement, l’éventuelle plus-value résultant de la transmission des titres au fonds de pérennité est réintégrée au résultat fiscal de l’entreprise ayant réalisé la transmission pour être soumise au régime fiscal correspondant.
B. Cession ultérieure des titres reçus à l'occasion de l'opération bénéficiant du sursis
1. Calcul de la plus ou moins-value de cession
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Le montant du profit ou de la perte résultant de la cession ultérieure des titres transmis au fonds de pérennité est déterminé par référence à la valeur fiscale que les titres avaient à la date de la transmission. Il s'agit le plus souvent de la valeur d'origine des titres.
La valeur fiscale des titres transmis peut toutefois différer de leur valeur d'origine. Tel est le cas notamment lorsque ces titres proviennent eux-mêmes d'une opération placée sous un régime de sursis qui n'a pas été remis en cause lors de l'opération d'échange (II-A-1 § 90).
2. Décompte du délai de détention des titres transmis
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Le délai de détention, qui permet de déterminer la nature à court ou à long terme de la plus ou moins-value de cession de titres, doit en principe être décompté à partir de leur date d'entrée dans le patrimoine du détenteur. Toutefois, il est admis que le délai de détention des titres transmis à titre gratuit à un fonds de pérennité s'apprécie à compter de la date d'acquisition ou de souscription de ces derniers par l’entreprise les ayant transmis. Pour plus de précisions sur le régime des plus et moins-values à long terme, il convient de se reporter au BOI-BIC-PVMV-30-30-10 et au BOI-IS-BASE-20-20-10.
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Si les titres transmis proviennent d'une opération qui avait elle-même un caractère intercalaire et placée sous un régime de faveur dont le bénéfice n’est pas remis en cause du fait de l'opération de transmission (II-A-1 § 90), il convient de retenir la date d'acquisition ou de souscription originelle.
III. Évènements mettant fin au sursis
A. Cession ultérieure des titres
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Conformément aux dispositions de l’article 177 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, les titres de capital ou parts sociales des sociétés transmises au fonds de pérennité à l’occasion de sa création sont en principe inaliénables.
Toutefois, l’entreprise qui réalise la transmission des titres peut prévoir que dans la limite d’une fraction du capital social non nécessaire au contrôle de la société ainsi détenue, cette inaliénabilité ne frappe pas la totalité des titres transmis.
Il est mis fin au sursis d'imposition en cas de cession, par le fonds de pérennité de titres bénéficiant du régime prévu au 7 quater de l’article 38 du CGI.
La plus ou moins-value résultant de cette cession, calculée dans les conditions prévues au I-B-1 § 120, est prise en compte dans le résultat du fonds de pérennité au titre de l’exercice au cours duquel la cession intervient.
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Il convient d'entendre par cession au sens du 1 de l'article 38 du CGI, toute opération ayant pour effet d'entraîner la sortie des titres de l'actif immobilisé (vente, échange, conversion, etc.). Le régime de sursis d'imposition prévu au 7 quater de l'article 38 se combinant avec les régimes de sursis d'imposition prévus au 7 bis de l’article 38 du CGI, à l'article 210 A du CGI et à l'article 210 B du CGI, la cession ultérieure des titres transmis placée sous l'un de ces régimes n'entraîne pas la déchéance du présent régime.
B. Dissolution du fonds de pérennité
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Conformément aux dispositions de l’article 177 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 le fonds de pérennité peut être dissous dans les conditions définies par ses statuts, ou sur décision judiciaire. La dissolution du fonds entraine sa liquidation, dans les conditions prévues par ses statuts ou, à défaut, à l’initiative du liquidateur. À l’issue des opérations de liquidation, l’actif net est transféré à un bénéficiaire désigné par les statuts, à un autre fonds de pérennité, une fondation reconnue d’utilité publique ou un fonds de dotation.
La dissolution entraînant la liquidation du fonds de pérennité emporte les mêmes effets que la cession des titres de capital et parts sociales constituant la dotation du fonds. La plus ou moins-value afférente à ces titres et parts sociales, calculée dans les conditions rappelées au I-B-1 § 120, est prise en compte dans le résultat de liquidation. Pour plus de précisions sur les conséquences fiscales de la cessation d’activité, il convient de se reporter au BOI-IS-CESS-10.