Date de début de publication du BOI : 23/10/2024
Identifiant juridique : BOI-INT-CVB-RUS

INT - Convention fiscale entre la France et la Fédération de Russie

Actualité liée : 23/10/2024 : INT - Incidences de la suspension des articles 5 à 22 et 24 de la convention fiscale entre la France et la Fédération de Russie et des points 2 à 9 de son protocole

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Une convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune (PDF - 269 Ko) a été signée à Paris le 26 novembre 1996. Elle est assortie d’un protocole faisant partie intégrante de la convention.

La loi n° 98-1146 du 16 décembre 1998 autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole) a autorisé l’approbation de cette convention, qui a été publiée par le décret n° 99-431 du 20 mai 1999 portant publication de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole), signée à Paris le 26 novembre 1996.

Cette convention est entrée en vigueur le 9 février 1999.

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Cette convention a été modifiée par la convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, publiée par le décret n° 2019-6 du 4 janvier 2019 portant publication de la convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, adoptée à Paris le 24 novembre 2016, signée par la France le 7 juin 2017.

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Par décret présidentiel n° 585 en date du 8 août 2023, ratifié par la loi n° 598-FZ du 19 décembre 2023, la Fédération de Russie a suspendu, à compter du 8 août 2023, l’application des articles 5 à 22 et 24 de la convention fiscale franco-russe du 26 novembre 1996, ainsi que des points 2 à 9 de son protocole.

En vertu du principe de réciprocité d’application des accords internationaux (article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958), les mêmes articles de la convention et points du protocole ont été suspendus par la France à compter du 8 août 2023 et ont cessé de produire leurs effets à cette date. Cette suspension a fait l’objet de l’avis relatif à la suspension partielle par la Fédération de Russie de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune signée le 26 novembre 1996 et du protocole y relatif.

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La suspension partielle de la convention fiscale franco-russe du 26 novembre 1996 rend les stipulations conventionnelles suivantes inapplicables :

  • article 5, relatif à l’établissement stable ;
  • article 6, relatif aux revenus immobiliers ;
  • article 7, relatif aux bénéfices des entreprises ;
  • article 8, relatif aux bénéfices du trafic international ;
  • article 9, relatif à la correction des bénéfices ;
  • article 10, relatif aux dividendes ;
  • article 11, relatif aux intérêts ;
  • article 12, relatif aux redevances ;
  • article 13, relatif aux gains provenant de l’aliénation de biens ;
  • article 14, relatif aux revenus des professions indépendantes ;
  • article 15, relatif aux revenus des emplois salariés ;
  • article 16, relatif aux revenus des membres des conseils d’administration ou de surveillance ;
  • article 17, relatif aux revenus des artistes et sportifs ;
  • article 18, relatif aux pensions ;
  • article 19, relatif aux rémunérations publiques ;
  • article 20, relatif aux sommes reçues par les étudiants et stagiaires ;
  • article 21, relatif aux autres revenus ;
  • article 22, relatif à la fortune ;
  • article 24, relatif à la non-discrimination ;
  • points 2 à 9 du protocole, qui précisent certains articles de la convention susmentionnée.

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Le bénéfice de l’application des articles 5 à 22 et 24 de la convention (PDF - 269 Ko), ainsi que des points 2 à 9 de son protocole, ne peut donc plus être accordé, notamment en ce qui concerne les taux réduits de retenue à la source. Ces stipulations conventionnelles étant suspendues, les revenus concernés sont imposés dans chaque État conformément à leurs dispositions de droit interne.

I. Date de prise d’effet de la suspension

50

L’application des articles 5 à 22 et 24 de la convention (PDF - 269 Ko), ainsi que des points 2 à 9 de son protocole, a été suspendue par la Fédération de Russie à compter du 8 août 2023.

En vertu du principe de réciprocité d’application des accords internationaux (article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958), les mêmes stipulations de la convention ont également été suspendues par la France à compter du 8 août 2023.

Les revenus concernés par ces stipulations et dont le fait générateur intervient à partir de cette date ne sont, par conséquent, plus éligibles aux avantages conventionnels, sous réserve des aménagements apportés à certaines catégories de revenus, tels que détaillés au I § 60 à 110.

A. Bénéfices d’entreprises et revenus des professions indépendantes

60

Par tolérance, les bénéfices d’entreprises ainsi que les revenus des professions indépendantes, visés respectivement à l’article 7 de la convention (PDF - 269 Ko) et à l’article 14 de la convention (PDF - 269 Ko), afférents à des exercices fiscaux ouverts au plus tard le 7 août 2023, restent couverts par la convention, pour autant que ces exercices n’excèdent pas 12 mois.

B. Dividendes

70

Sont éligibles aux avantages conventionnels de l’article 10 de la convention (PDF - 269 Ko) les dividendes dont la décision ayant donné lieu à leur distribution est intervenue au plus tard le 7 août 2023.

C. Intérêts et redevances

80

Sont éligibles aux avantages conventionnels de l’article 11 de la convention (PDF - 269 Ko) et de l’article 12 de la convention (PDF - 269 Ko) les intérêts et redevances afférents à des périodes échues au plus tard le 7 août 2023.

Un prorata temporis sera opéré, le cas échéant, afin de déterminer la quote-part des intérêts et redevances éligible aux avantages conventionnels.

D. Gains en capital

90

Sont éligibles aux avantages conventionnels de l’article 13 de la convention (PDF - 269 Ko) les gains issus d’aliénations réalisées au plus tard le 7 août 2023.

E. Salaires, pensions et rémunérations publiques

100

Par tolérance, les revenus des emplois salariés, ainsi que les pensions et rémunérations publiques, afférents à des périodes échues au plus tard le 30 septembre 2023, sont éligibles aux avantages conventionnels des articles 15, 18 et 19 de la convention (PDF - 269 Ko).

F. Fortune

110

Le fait générateur de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) est constitué par la détention, au 1er janvier de l’année d’imposition, d’un patrimoine immobilier imposable d’une valeur nette supérieure au seuil mentionné au BOI-PAT-IFI-10-10. La condition d’assujettissement s’apprécie donc au 1er janvier de chaque année d’imposition.

Par conséquent, la fortune possédée au 1er janvier 2023 demeure imposable, pour l’année concernée, conformément aux stipulations de l’article 22 de la convention (PDF - 269 Ko). La convention cesse, en revanche, de s’appliquer au titre des années d’imposition à compter du 1er janvier 2024.

II. Conséquences de la suspension

A. Bénéfices d’entreprises et revenus des professions indépendantes

120

L’article 7 de la convention (PDF - 269 Ko) et l’article 14 de la convention (PDF - 269 Ko), relatifs aux bénéfices des entreprises et aux revenus des professions indépendantes, étant suspendus, l’imposition procède désormais du droit interne de chaque État.

1. Bénéfices des entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés

130

En vertu de la législation française, le lieu d’exploitation des entreprises détermine en principe l’imposition des bénéfices passibles de l’impôt sur les sociétés.

Par conséquent, les bénéfices des entreprises exploitées en Russie par des sociétés ayant leur siège en France se trouvent soustraits à l’application de l’impôt français. À l’inverse, les entreprises dont le siège est situé en Russie sont imposables en France pour les profits tirés de leurs exploitations sur le territoire français.

Les règles relatives à la territorialité de l’impôt sur les sociétés sont commentées au BOI-IS-CHAMP-60.

Remarque : La Russie est inscrite sur la liste des États et territoires non coopératifs (ETNC) depuis l’arrêté du 16 février 2024 modifiant l’arrêté du 12 février 2010 pris en application du deuxième alinéa du 1 de l’article 238-0 A du code général des impôts. En conséquence, les sommes visées à l’article 238 A du code général des impôts, payées ou dues à des personnes physiques ou morales domiciliées ou établies en Russie, ne sont pas, en principe, admises en déduction de l’assiette de l’impôt sur les sociétés. Toutefois, leur déduction peut être admise si le débiteur apporte la preuve que les dépenses correspondent à des opérations réelles et qu’elles ne présentent pas un caractère anormal ou exagéré, et, en outre, que les opérations qu’elles rémunèrent ont principalement un objet et un effet autres que de permettre la localisation de ces dépenses dans un ETNC (pour plus de précisions sur le dispositif et la clause de sauvegarde associée, il convient de se reporter au III § 270 à 370 du BOI-INT-DG-20-50-20).

2. Bénéfices des entreprises soumises à l’impôt sur le revenu

140

En vertu de la législation française, les bénéfices réalisés en France et en Russie par des entreprises soumises à l’impôt sur le revenu sont imposables, selon leur nature, conformément aux règles applicables aux bénéfices industriels et commerciaux (BOI-BIC), aux bénéfices non commerciaux (BOI-BNC) ou aux bénéfices agricoles (BOI-BA).

En application de ces règles, les contribuables domiciliés en France sont soumis à une obligation fiscale illimitée et imposés dans les conditions de droit commun sur l’ensemble de leurs revenus de source française ou étrangère (BOI-IR-CHAMP-10).

Remarque : La Russie étant inscrite sur la liste des ETNC, la déduction de l’assiette de l’impôt sur le revenu des sommes payées ou dues à des personnes physiques ou morales domiciliées ou établies en Russie n’est, en principe, pas admise, à moins que le contribuable apporte la preuve que les dépenses correspondent à des opérations réelles et qu’elles ne présentent pas un caractère anormal ou exagéré, et, en outre, que les opérations qu’elles rémunèrent ont principalement un objet et un effet autres que de permettre la localisation de ces dépenses dans un ETNC (pour plus de précisions sur le dispositif et la clause de sauvegarde associée, il convient de se reporter au III § 270 à 370 du BOI-INT-DG-20-50-20).

3. Correction des bénéfices

150

L’article 9 de la convention (PDF - 269 Ko), relatif à la correction des bénéfices, étant suspendu, l’ajustement primaire opéré sur les bénéfices réalisés par une entreprise dans un État n’aura plus pour conséquence un ajustement corrélatif des bénéfices dans l’autre État.

Remarque : La Russie étant inscrite sur la liste des ETNC, l’administration fiscale française n’a en principe pas à vérifier le respect de la condition de dépendance ou de contrôle pour pouvoir rectifier les résultats déclarés par les entreprises françaises à raison de bénéfices indirectement transférés à des entreprises situées en Russie, sauf si le contribuable apporte la preuve de la réalité des opérations (pour plus de précisions sur le dispositif et la clause de sauvegarde associée, il convient de se reporter au V § 430 et 440 du BOI-INT-DG-20-50-20).

En outre, les obligations documentaires relatives aux prix de transfert sont renforcées s’agissant des transactions réalisées avec des entités liées situées ou constituées en Russie (pour plus de précisions, il convient de se reporter au VI § 450 à 470 du BOI-INT-DG-20-50-20).

B. Revenus passifs

160

L’application des articles 10, 11 et 12 de la convention (PDF - 269 Ko) étant suspendue, l’imposition des dividendes, intérêts et redevances procède désormais des dispositions de droit interne de chaque État.

1. Dividendes

170

La suspension de l’article 10 de la convention (PDF - 269 Ko) rend inapplicables les taux réduits de retenue à la source de 5 % ou 10 %, de même que le taux général de 15 %.

Du côté français, les dividendes distribués par des sociétés françaises à des bénéficiaires domiciliés en Russie sont imposés conformément aux dispositions de droit interne. En application de ces dispositions, ces revenus sont soumis à une retenue à la source au taux normal de l’impôt sur les sociétés lorsque les bénéficiaires sont des personnes morales (II § 20 du BOI-RPPM-RCM-30-30-10-20). Une retenue à la source au taux mentionné au I § 10 et 15 du BOI-RPPM-RCM-30-30-10-20 s’applique lorsqu’il s’agit de personnes physiques.

2. Intérêts

180

La suspension de l’article 11 de la convention (PDF - 269 Ko) rend inapplicable le principe de l’imposition exclusive des intérêts dans l’État de résidence.

Les intérêts sont désormais imposés conformément aux dispositions de droit interne de chaque État.

3. Redevances

190

L’imposition des redevances est désormais établie conformément aux dispositions de droit interne du fait de la suspension de l’article 12 de la convention (PDF - 269 Ko), en vertu duquel ces revenus faisaient l’objet d’une imposition exclusive dans l’État de résidence.

Les redevances de source russe perçues par des bénéficiaires domiciliés en France sont soumises en France à l’impôt sur les sociétés ou à l’impôt sur le revenu, selon le cas.

Par ailleurs, une retenue à la source s’applique, le cas échéant, aux redevances payées par un débiteur qui exerce une activité en France à des bénéficiaires domiciliés ou établis en Russie qui n’ont pas d’installation professionnelle permanente en France (BOI-IR-DOMIC-10-20-20-50).

C. Gains en capital

200

Du fait de la suspension des stipulations de l’article 13 de la convention (PDF - 269 Ko), relatives à l’imposition des gains provenant de l’aliénation de biens, seul le droit interne de chaque État détermine désormais leur imposition.

En France, s’agissant des personnes physiques, les modalités d’imposition diffèrent selon qu’il s’agit de plus-values immobilières (BOI-RFPI-PVI) ou mobilières (BOI-RPPM).

En ce qui concerne les entreprises soumises à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, les règles applicables aux gains issus de la cession de biens sont explicitées au BOI-BIC-PVMV. S’agissant des sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés, les modalités de traitement des plus-values sont définies au BOI-IS-BASE-20.

Le régime des plus-values immobilières des non-résidents est examiné au BOI-RFPI-PVINR.

D. Salaires, pensions et rémunérations publiques

210

Les articles 15, 18 et 19 de la convention (PDF - 269 Ko), relatifs respectivement aux revenus des emplois salariés, aux pensions et aux rémunérations publiques, sont suspendus. L’imposition de ces revenus est désormais déterminée par le droit interne de chaque État.

1. Revenus des emplois salariés

220

Les salaires de source russe perçus par des bénéficiaires domiciliés en France sont soumis, en France, à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires (BOI-RSA-CHAMP-10).

Les salaires de source française versés à des bénéficiaires domiciliés en Russie donnent lieu à l’application d’une retenue à la source (BOI-IR-DOMIC-10-20-20-10).

2. Pensions

230

Les pensions, y compris les pensions de retraite, de source russe perçues par des bénéficiaires domiciliés en France sont soumises, en France, à l’impôt sur le revenu (BOI-RSA-PENS-10).

À l’inverse, les pensions de source française servies à des bénéficiaires domiciliés en Russie donnent lieu à l’application d’une retenue à la source (BOI-IR-DOMIC-10-20-20-10).

3. Rémunérations publiques

240

Les traitements publics de source russe perçus par des bénéficiaires domiciliés en France sont soumis, en France, à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires (BOI-RSA-CHAMP-10-30-10).

Les traitements publics de source française versés à des bénéficiaires domiciliés en Russie donnent lieu à l’application d’une retenue à la source (BOI-IR-DOMIC-10-20-20-10).

E. Jetons de présence, revenus des artistes et sportifs et sommes reçues par les étudiants et stagiaires

250

L’imposition des revenus et sommes visés aux articles 16, 17 et 20 de la convention (PDF - 269 Ko) est désormais déterminée par le droit interne de chaque État.

F. Fortune

260

L’article 22 de la convention (PDF - 269 Ko) étant suspendu, la fortune constituée de biens immobiliers est désormais soumise aux dispositions de droit interne de chaque État.

S’agissant de la France, les règles de territorialité de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) sont détaillées au BOI-PAT-IFI-10.

G. Élimination des doubles impositions

270

L’article 23 de la convention (PDF - 269 Ko), relatif à l’élimination des doubles impositions, stipule que son application est réservée aux impositions établies conformément aux dispositions de la convention.

Les articles relatifs au traitement conventionnel des revenus catégoriels étant suspendus (§ 30), les impositions établies sur le seul fondement des droits internes russe et français ne peuvent être considérées comme étant opérées conformément aux stipulations de la convention au sens de son article 23.

Il en résulte que l’application de l’article 23 de la convention et des mécanismes d’élimination des doubles impositions qu’il prévoit est rendue inopérante.

Dès lors, les impôts prélevés par la Russie portant sur des revenus ou des éléments de fortune affectés par la suspension de la convention dans les conditions exposées au I § 50 à 110 n’ouvrent droit à aucun crédit d’impôt en France.

Ils sont néanmoins admis en déduction de l’assiette de l’impôt français dans les conditions de droit commun (pour plus de précisions, il convient de se reporter notamment au BOI-BIC-CHG-40-30 et au BOI-RPPM-RCM-20-10-20-60).