Date de début de publication du BOI : 13/08/2021
Identifiant juridique : BOI-TVA-CHAMP-10-10-40-40

TVA - Champ d'application et territorialité - Opérations imposables en raison de leur nature - Opérations des intermédiaires

Actualitée liée : 13/08/2021 : BIC - TVA - Consultation publique - Paquet TVA sur le commerce électronique - Réforme des règles de TVA applicables aux opérations du commerce électronique (loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021, art. 51 ; loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, art. 147) (Entreprises - Publication urgente)

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Les dispositions du 1° du V de l'article 256 du code général des impôts (CGI) et du III de l'article 256 bis du CGI prévoient dès règles particulières pour certains des assujettis qui réalisent des opérations d'entremise portant sur des livraisons de biens ou des prestations de services. Ces dispositions distinguent deux catégories d'intermédiaires :

- ceux qui agissent pour le compte et au nom d'autrui, dits « transparents », pour lequels les règles particulières ne s'appliquent pas et qui sont traités comme des prestataires de services ;

- ceux qui agissent pour le compte d'autrui mais en leur nom propre, dits « opaques », pour lesquels les règles particulières s'appliquent et qui sont traités comme des acheteurs-revendeurs.

Par ailleurs, le régime des ventes en consignation faites par un commissionnaire agissant en son nom propre est étudié au I-C-3 § 326 à 329 du BOI-TVA-CHAMP-10-10-40-20.

Remarque :  Le régime des livraisons de biens facilitées par des interfaces électroniques prévu au 2° du V de l'article 256 du CGI est commenté au BOI-TVA-DECLA-10-30.

I. Distinction des intermédiaires

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L'intermédiaire s'entremet entre deux personnes, la personne pour le compte de qui il agit (appelée ci-après le « commettant ») et un tiers.

Les activités des intermédiaires se caractérisent :

- juridiquement, par l'existence d'un mandat prévoyant les modalités de la rémunération de l'intermédiaire et l'existence d'une reddition de comptes, qui permet à l'intermédiaire d'agir pour le compte d'autrui (l'intermédiaire n'agit pas de sa propre initiative) ;

- économiquement, par le fait que les intermédiaires ne fournissent pas avec leurs propres moyens d'exploitation les biens et les services dans la transaction desquels ils s'entremettent.

Les intermédiaires ne sont donc notamment jamais propriétaires des biens qu'ils sont chargés d'acheter ou de vendre ni les exécutant des services pour lesquels ils s'entremettent.

Les dispositions de la loi conduisent à soumettre à un régime différent les activités des intermédiaires selon qu'ils agissent au nom d'autrui ou en leur nom propre.

Remarque : Les intermédiaires sont susceptibles de relever de différents statuts, notamment ceux prévus par le code de commerce pour les courtiers, les commissionnaires ou les agents commerciaux. L'application de ces statuts est, en tant que telle et sous réserve des précisions indiquées ci-dessous, sans incidence sur les règles applicables pour les besoins de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui sont déterminées au regard des conditions objectives, contractuelles et matérielles, de réalisation des opérations concernées.

A. Intermédiaires agissant au nom d'autrui (dits « transparents »)

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Dans ses relations avec les tiers cocontractants (acheteurs ou vendeurs), l'intermédiaire agissant au nom d'autrui apparaît clairement comme le représentant du commettant.

Tel est notamment le cas lorsque l'intermédiaire contracte personnellement avec le tiers et que :

- le contrat mentionne expressément qu'il agit au nom d'autrui. Cette condition n'est remplie que si le contrat indique le nom ou la raison sociale, l'adresse ainsi que le numéro d'assujetti du commettant en ce qui concerne les opérations intracommunautaires pour lesquelles la communication au client de cette information est prévue ;

- en l'absence de contrat écrit, la facture est établie directement par le commettant (entremise « à la vente »), ou adressée directement par le tiers au commettant (entremise « à l'achat »). Si la facture est établie par l'intermédiaire ou adressée à l'intermédiaire, elle doit faire apparaître que celui-ci agit au nom d'autrui dans les mêmes conditions que ci-dessus ;

- en l'absence de facture et de contrat écrit, les circonstances de droit, notamment l'examen des clauses du contrat unissant l'intermédiaire au commettant, ou de fait permettent d'établir que le tiers avait connaissance du fait que l'intermédiaire agissait au nom d'autrui et de tous les éléments d'information mentionnés ci-dessus.

En particulier, relèvent de cette catégorie, lorsqu'ils sont assujettis, les agents commerciaux au sens de l'article L. 134-1 du code de commerce.

B. Intermédiaires agissant en leur nom propre (dits « opaques »)

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Les intermédiaires agissent en leur nom propre lorsqu'ils ne remplissent pas les conditions permettant de considérer qu'ils agissent au nom d'autrui.

En particulier, relèvent de cette catégorie, lorsqu'ils sont assujettis, les commissionnaires au sens de l'article L.132-1 du code de commerce.

II. Régime applicable aux opérations des intermédiaires selon qu'ils agissent au nom d'autrui ou en leur nom propre

A. Intermédiaires agissant au nom d'autrui (dits « transparents »)

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Les opérations d'entremise de ces intermédiaires sont, pour les besoins de la TVA, regardées comme des prestations de services indépendantes. Ces prestations suivent leur régime propre, notamment en terme de taux, indépendamment du régime de TVA des livraisons ou services objet de l'entreprise.

Par dérogation, dans certains cas limitativement énumérés par la loi, le régime applicable à ces prestations dépend de celui de l'opération intermédiée. Ainsi, en application du 7° de l'article 259 du CGI la prestation d'intermédiation à destination d'une personne non assujettie est territorialisée en France lorsque l'opération intermédiée est territorialisée en France. En outre, en application de l'article 263 du CGI, la prestation intermédiée est exonérée lorsque l'opération intermédiée bénéfice d'une exonération prévue à l'article 262 ter du CGI.

B. Intermédiaires agissant en leur nom propre (dits « opaques »)

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Ces intermédiaires sont regardés comme ayant personnellement acquis et livré le bien lorsqu'ils s'entremettent dans des livraisons de biens ou comme ayant personnellement reçu ou fourni les services lorsqu'ils s'entremettent dans des prestations de services. Ils réalisent le cas échéant des livraisons ou des acquisitions intracommunautaires de biens.

Un commissionnaire « à la vente » de biens est réputé acheter les biens à son commettant et les vendre au tiers acheteur. Un commissionnaire « à l'achat » de biens est réputé acheter les biens au tiers fournisseur et les vendre à son commettant. Les principes sont les mêmes en ce qui concerne les intermédiaires qui s'entremettent dans des prestations de services.

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Ces règles emportent deux conséquences :

- l'intermédiaire est, pour les besoins de la TVA, réputé réaliser lui-même la livraison du bien ou la fourniture du service, à destination du commettant s'il agit « à l'achat », ou du tiers cocontractant s'il agit « à la vente ». La base d'imposition de l'opération de l'intermédiaire est égale à la contrepartie totale cédée par l'acquéreur, correspondant au prix acquitté par le tiers ou le commettant, commission comprise (CGI, art. 266, 1-b al. 2) ;

- le vendeur du bien ou du service, c'est-à-dire le tiers cocontractant en cas d'entremise « à l'achat » ou le commettant en cas d'entremise « à la vente » est réputé réaliser une livraison du bien ou la fourniture d'un service à destination de l'intermédiaire. La base d'imposition de cette opération est égale au prix hors commission (CGI, art. 266, 1-b, al. 2).

Remarque : Dans le cas d'opérations réalisées par des intermédiaires opaques, la commission n'est donc jamais imposée en tant que telle.

Ces deux opérations connaissent également des règles particulières en matière de détermination du fait générateur de la taxe. En effet, conformément au a ter du 1 de l'article 269 du CGI, pour les opérations réalisées par les intermédiaires, le fait générateur de la taxe intervient au moment où l'opération dans laquelle l'assujetti s'entremet est effectuée (II-B § 100 du BOI-TVA-BASE-20-40).

Pour le reste, ces opérations suivent chacune le régime de TVA des livraisons de biens ou prestations de services qui sont intermédiées, notamment en matière de taux, d'exonération ou de territorialité.

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Exemple : Hypothèse d'un intermédiaire agissant en son nom propre (commettant et tiers cocontractant établis en France et redevables de la TVA).

Le montant total de la transaction est de 10 000 € hors taxes, commission incluse.

La TVA applicable est de 20 %.

Le montant de la commission est de 1 500 € hors taxes.

Les conséquences sont précisées dans le tableau ci-après :

Intermédiaire agissant en son nom propre dit « opaque »

À la vente

À l'achat

Situation du commettant

Situation de l'intermédiaire

Situation du tiers

Situation du tiers

Situation de l'intermédiaire

Situation du commettant

Vente à l'intermédiaire

- Base d'imposition (sans la commission) : 10 000 - 1 500 = 8 500 €

- Taxation : 8 500 x 20% = 1 700 €

Soit 1 700€ de TVA à collecter

Achat au commettant :

- Déduction : 1 700 €

Soit 1 700€ de TVA à déduire.

Vente au tiers :

- Base d'imposition (commission comprise) : 10 000 €

- Taxation : 10 000 x 20% = 2 000 €

Soit 2 000€ de TVA à collecter.

Achat à l'intermédiaire

- Déduction : 2 000 €

Soit 2 000€ de TVA à déduire.

Vente à l'intermédiaire :

- Base d'imposition (sans la commission) :10 000 - 1 500 = 8 500 €

- Taxation : 8 500 x 20% = 1 700 €

Soit 1 700€ de TVA à collecter

Achat au tiers :

- Déduction : 1 700 €

Soit 1 700€ de TVA à déduire.

Vente au commettant :

- Base d'imposition (commission comprise) : 10 000 €

- Taxation : 10 000 x 20% = 2 000 €

Soit 2 000 € de TVA à collecter.

Achat à l'intermédiaire

- Déduction : 2 000 €

Soit 2 000€ de TVA à déduire.