CTX - Contentieux de l'assiette de l'impôt – Dispositions communes - Applicabilité des textes fiscaux dans le temps et l'espace
I. Textes fiscaux applicables dans le temps
A. Entrée en vigueur et abrogation des dispositions législatives et réglementaires
1. Entrée en vigueur des dispositions législatives et réglementaires
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Conformément à l'article 1 du code civil, les lois, ainsi que les actes administratifs faisant l'objet d'une publication au Journal officiel, entrent en vigueur à la date qu'ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication.
En cas d'urgence, entrent en vigueur dès leur publication les lois dont le décret de promulgation le prescrit et les actes administratifs pour lesquels le Gouvernement l'ordonne par une disposition spéciale.
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Une loi est immédiatement exécutoire même au cas où elle prévoit des actes réglementaires relatifs à son exécution, dès l'instant qu'il n'est pas spécifié que son application serait subordonnée à la publication desdits actes. Mais cette subordination peut être implicite et fait différer l'entrée en vigueur de la loi quand le texte de celle-ci, ne se suffisant pas à lui-même, a besoin d'être complété.
Cependant, il arrive fréquemment que la date d'application des dispositions législatives nouvelles soit expressément fixée par la loi elle-même.
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Par ailleurs, l'article 1 de la loi 2001-692 du 1er août 2001 portant loi organique relative aux lois de finances prévoit que « les lois de finances déterminent, pour un exercice, la nature, le montant et l'affectation des ressources et des charges de l'État, ainsi que l'équilibre budgétaire et financier qui en résulte ». L'article 34 de la loi précitée, quant à lui, prévoit notamment que « la loi de finances de l'année autorise, pour l'année, la perception des ressources de l'État et des impositions de toute nature affectées à des personnes morales autres que l'État ».
Ce texte de portée générale s'applique à l'ensemble des dispositions qui figurent dans les lois de finances initiales et notamment aux dispositions fiscales qui peuvent y être insérées.
Il en résulte que, sauf dispositions contraires, ces textes s'appliquent à compter du 1er janvier de l'année que la loi de finances concerne. Pour éviter toute difficulté à cet égard, les lois de finances successives prévoient dans leur article premier la mise en application de leurs dispositions.
2. Abrogation des dispositions législatives et réglementaires
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En application du principe du parallélisme des formes une disposition législative ou réglementaire ne peut être abrogée que par une disposition de même nature : une loi peut toujours mettre fin à une loi ; un décret peut toujours en abroger un autre.
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L'abrogation est le plus souvent prononcée de façon expresse soit en termes généraux par la disposition finale de la loi nouvelle, soit par une disposition particulière qui vise spécialement tel texte antérieur.
Elle est tacite quand les dispositions du texte nouveau sont incompatibles avec les dispositions du texte ancien (CE arrêt du 14 octobre 1970 n° 77238).
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Il est de principe que les lois spéciales priment sur les lois générales, sauf dispositions contraires.
Le même principe s'applique aux règlements.
B. Mise en application des dispositions fiscales
1. Règles générales relatives à la mise en application des dispositions fiscales
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D'une manière générale, la législation applicable quant au fond est celle en vigueur à la date du fait générateur de l'impôt, c'est-à-dire à la date de l'acte ou de l'événement qui a fait naître la dette d'impôt et, s'il s'agit de procédure contentieuse, au jour de la mise en recouvrement du rôle, à celui de la notification de l'avis de mise en recouvrement ou à celui du versement de l'impôt.
L'exposé ci-après contient, les solutions relatives aux cas les plus fréquemment rencontrés. Sauf dans l'hypothèse où elles visent un impôt déterminé, ces solutions peuvent être considérées comme applicables quelle que soit la nature des impôts, droits ou taxes faisant l'objet du litige.
a. Mise en application des dispositions fiscales relatives à l'assiette de l'impôt
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Ainsi qu'il est dit ci-dessus, la législation applicable est en principe celle en vigueur à la date du fait générateur de l'impôt.
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Cette règle s'applique notamment en matière de taxe sur la valeur ajoutée, où le fait générateur de l'imposition est principalement déterminé par les dispositions du 1 de l'article 269 du CGI.
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Il en est de même en matière de droits d'enregistrement.
En ce qui concerne les actes dont la loi prévoit qu'ils doivent être enregistrés et les mutations qui doivent être obligatoirement déclarées dans un délai déterminé, le fait générateur consiste dans la rédaction de l'acte ou dans la mutation elle-même. C'est donc à la date de cette rédaction ou de cette mutation qu'il convient de se placer pour déterminer la loi d'impôt applicable.
Pour les autres actes, les droits ne deviennent exigibles que si les parties requièrent la formalité. La législation applicable, notamment en matière de tarif, sera donc celle en vigueur à la date de la présentation à la formalité.
b. Mise en application des dispositions fiscales relatives à la compensation
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Selon la jurisprudence du Conseil d'État, le texte applicable est celui en vigueur à la date de la réclamation (CE arrêt du 4 novembre 1988 n° 61185).
c. Mise en application des dispositions relatives aux mesures d'expertise
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Le texte applicable est celui en vigueur à la date du jugement qui a ordonné l'expertise (CE arrêt du 5 janvier 1972 n° 80132).
d. Mise en application des dispositions fiscales relatives aux pénalités
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La loi applicable en matière de pénalités est celle en vigueur au moment où l'infraction est commise.
Pour les impôts sur le revenu et les taxes sur le chiffre d'affaires, il a été jugé que les pénalités qui sont déterminées en fonction du montant des droits éludés, constituent un accessoire de l'impôt et doivent en conséquence, être calculées par application :
- soit de la législation en vigueur pour le calcul des droits en principal auxquels ces pénalités s'ajoutent en matière d'impôt sur le revenu (CE arrêts du 26 mai 1970 nos 74849 et 75172) et en matière d'impôt sur les sociétés (CE section arrêt du 5 octobre 1973 n° 82836) ;
- soit de la législation en vigueur pendant chaque période d'imposition, notamment en matière de taxes sur le chiffre d'affaires (CE arrêts des 26 mai 1970 nos 76193 et 76394, et CE arrêt du 18 octobre 1972 n° 77854).
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Cette règle est cependant tempérée par le principe de l'application rétroactive de la loi pénale nouvelle plus douce.
Ainsi, s'agissant du régime des pénalités fiscales issu des articles 12 à 25 de l'ordonnance n° 2005-1512 du 7 décembre 2005 relative à des mesures de simplification en matière fiscale et à l'harmonisation et l'aménagement du régime des pénalités, entré en vigueur le 1er janvier 2006, les principes généraux d'application dans le temps des lois et des principes de non rétroactivité de la loi pénale plus sévère et de rétroactivité de la loi pénale plus douce, applicables aux sanctions fiscales (CE avis du 5 avril 1996 n° 176 611) trouvent à s'appliquer comme suit.
- Premièrement, les infractions commises depuis le 1er janvier 2006 sont dans tous les cas sanctionnées sur le fondement des dispositions issues de l'ordonnance.
- Deuxièmement, les nouvelles dispositions issues de l'ordonnance s'appliquent rétroactivement aux infractions commises avant le 1er janvier 2006 n'ayant pas fait l'objet d'une sanction définitive lorsqu'elles prévoient une sanction inférieure à celle antérieurement applicable ou lorsqu'une sanction est supprimée.
Il en est ainsi de la réduction de 150 à 100 % de la majoration pour opposition à contrôle (CGI, art. 1732).
- Troisièmement, les anciens textes demeurent applicables aux infractions commises antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance lorsque le nouveau texte prévoit une sanction supérieure à celle jusqu'alors encourue.
Il en est ainsi de l'augmentation de 50 à 80 % de l'amende pour dissimulation de prix (ancien article 1827 du CGI transféré sous l'article 1729 du CGI ).
Il en est ainsi également de l'augmentation de 25 à 50 % de l'amende pour non délivrance d'une note à un particulier en matière de travaux immobiliers (ancien article 1788 quater du CGI repris sous l'article 1737 du CGI ).
- Quatrièmement, lorsqu'une sanction est créée ou étendue, les infractions en cause qui ne pouvaient pas être sanctionnées en application des textes antérieurs ne peuvent l'être sur le fondement des nouvelles dispositions que lorsqu'elles sont commises postérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance, soit le 1er janvier 2006.
Il en est ainsi de la pénalisation des remboursements obtenus indûment par manquement délibéré ou au moyen de manœuvres frauduleuses autres que ceux déjà susceptibles d'être condamnés pénalement en application des textes antérieurs.
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Par ailleurs, s'agissant du régime de faveur des marchands de biens, la Cour de cassation a indiqué qu'il n'y a pas lieu de faire application du principe de la rétroactivité de la loi pénale plus douce lorsqu'un texte substitue un dispositif d'amendes fiscales à une mesure qui n'a pas le caractère d'une peine telle que la déchéance d'un régime de faveur (Cass. Com., 15 septembre 2009, pourvoi n° 08-18013).
e. Mise en application des dispositions fiscales relatives à la charge de la preuve
140
En matière de charge de la preuve, le texte applicable est également celui en vigueur lors du fait générateur (CE arrêt du 5 novembre 1969 n° 65993).
f. Mise en application des dispositions fiscales relatives à la procédure d'imposition
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L'article 108 de la loi n° 92-1376 du 30 décembre 1992 portant loi de finances pour 1993, codifié à l'article L. 284 du LPF, prévoit que sauf disposition contraire, les règles de procédure fiscale ne s'appliquent qu'aux formalités accomplies après leur date d'entrée en vigueur, quelle que soit la date de la mise en recouvrement des impositions.
Ce principe s'applique :
- aux règles de procédure entrées en vigueur depuis le 1er janvier 1993 ;
- aux règles de procédure antérieures. Ces dispositions peuvent donc être invoquées pour le règlement des affaires en cours, à l'exception toutefois de celles ayant donné lieu à une décision de justice contraire passée en force de chose jugée avant le 1er janvier 1993.
Il résulte de ces dispositions que sauf disposition contraire, la régularité de la procédure fiscale s'apprécie en fonction des règles en vigueur lors de l'accomplissement de chaque acte, indépendamment de la date de mise en recouvrement des impositions.
En conséquence, une modification des textes de procédure intervenue entre l'accomplissement d'un acte et la mise en recouvrement ne remet pas en cause la validité de cet acte et la procédure, régulière au regard des anciennes règles, n'a pas à être reprise en vue de sa mise en conformité avec la règle nouvelle.
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Le caractère interprétatif de l'article L. 284 du LPF s'applique à tous les textes de procédure intervenus antérieurement à la publication de la loi n° 92-1376 du 30 décembre 1992 portant loi de finances pour 1993 et qui ne précisent pas eux-mêmes les conditions de leur entrée en vigueur.
Ainsi les notifications de redressements adressées avant le 1er janvier 1990 et pour lesquelles la mise en recouvrement est intervenue postérieurement, n'avaient pas à mentionner, sans demande expresse du contribuable, les conséquences financières du contrôle; l'article L. 48 du LPF modifié par le I de l'article 101 de la loi n° 89-935 du 29 décembre 1989 portant loi de finances pour 1990 qui prévoyait cette mention n'étant entré en vigueur que le 1er janvier 1990.
De même, le Conseil d'État a pu juger que le 1 de l'article 3 de la loi n° 77-1453 du 29 décembre 1977, qui prévoyait que les notifications de redressements effectués dans le cadre de la rectification d'office devaient être revêtues du visa d'un agent ayant au moins le grade d'inspecteur principal, ne s'appliquait pas aux notifications de redressements adressées avant le 1er janvier 1978, date d'entrée en vigueur de cette règle nouvelle, alors même que la mise en recouvrement serait intervenue ultérieurement (CE 12 février 1993 n° 75601 infirmant la jurisprudence antérieure CE Section arrêt du 13 décembre 1991 n° 65940-66868).
Sont concernées par cette disposition les règles de procédure relatives à l'assiette, au contrôle et au recouvrement, qu'elles résultent d'un texte législatif ou réglementaire.
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L'article L. 284 du LPF s'applique tant aux procédures concernant les droits qu'à celles régissant les pénalités. Ainsi, les lettres de motivation des pénalités exclusives de bonne foi, notifiées avant l'entrée en vigueur de la loi 86-1317 du 30 décembre 1986 portant loi de finances pour 1987, codifiée à l'article L. 80 E du LPF, n'avaient pas à comporter le visa d'un agent ayant au moins le grade d'inspecteur principal, même si la mise en recouvrement n'est intervenue que postérieurement à la loi qui a introduit cette précision.
g. Mise en application des dispositions fiscales relatives aux réclamations
1° Exercice du droit de réclamation et du droit de recours
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En règle générale, le droit de réclamation est régi, tout comme les délais qui en sont un élément constitutif, par la législation en vigueur soit au jour de la mise en recouvrement du rôle, soit au jour de la notification de l'avis de mise en recouvrement, soit au jour du versement de l'impôt si cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement (CE arrêt du 6 décembre 1972 n° 80093).
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Quant au droit de former un recours contre une décision administrative ou juridictionnelle, il est définitivement fixé au jour de la notification de la décision administrative (CE arrêt du 4 juin 1965 n° 64074 ) ou à la date où le jugement intervient (CE arrêt du 8 décembre 1967 n° 65902).
2° Formes qui règlent l'exercice du droit de réclamation
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En règle générale, les formes qui règlent l'exercice du droit de réclamation sont régies par la loi en vigueur à la date à laquelle le contribuable saisit le service des impôts.
Il peut également s'agir de la date à laquelle la demande introductive d'instance est enregistrée (CE arrêt du 11 décembre 1970 n°76227 et 76568 ).
h. Mise en application des dispositions fiscales relatives au sursis de paiement
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Le texte applicable est celui dont la rédaction était en vigueur au moment de la mise en recouvrement des impositions contestées (CE arrêts du 16 décembre 1970 n° 72217 et 23 avril 1971 n° 77799).
i. Mise en application des dispositions fiscales relatives à la transaction
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Le texte applicable en matière de transaction est celui en vigueur à la date à laquelle est signée la transaction (CE arrêt du 8 novembre 1972 n° 80514).
2. Cas particuliers concernant la mise en application des dispositions fiscales
a. Mise en application des dispositions fiscales relatives à l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés
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En matière d'impôt sur le revenu, la législation applicable est, sauf dispositions contraires de la loi, celle en vigueur à la fin de l'année au titre de laquelle l'impôt est établi.
240
En matière d'impôt sur les sociétés, il est fait application de la législation en vigueur au jour de la clôture de la période de réalisation des profits imposables (clôture normale de l'exercice, cession, dissolution, cessation, transformation).
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En ce qui concerne plus particulièrement le domaine d'application des dispositions nouvelles, il importe d'opérer une distinction suivant que la disposition nouvelle figure dans une loi de finances ou dans une autre loi.
Lorsqu'une disposition nouvelle figure dans une loi de finances, il convient de considérer qu'il a été tenu compte de son incidence dans l'évaluation des recettes budgétaires de l'année à laquelle s'applique la loi considérée. Il s'ensuit que cette disposition doit trouver sa première application pour l'établissement des impôts et taxes dont le recouvrement doit intervenir au cours de ladite année, et, notamment, en matière d'impôt sur le revenu, pour l'établissement des cotisations dues à raison des bénéfices ou revenus de l'année précédente ou des exercices clos au cours de l'année précédente.
Lorsqu'une disposition nouvelle figure dans une loi autre que la loi de finances, une distinction doit être faite selon le domaine de la disposition.
S'il s'agit d'une disposition relative aux règles générales de la détermination ou de l'évaluation des bases d'imposition, à la procédure d'établissement de l'impôt, au calcul des cotisations ou au régime des pénalités, elle doit trouver son application pour l'imposition de l'ensemble des bénéfices ou revenus réalisés au cours des exercices clos ou, d'une façon plus générale, des périodes d'imposition se terminant après la date d'entrée en vigueur de la loi.
Remarque : Des décisions particulières peuvent être prises pour rendre immédiatement applicables aux procédures en cours à la date de l'entrée en vigueur de la loi des mesures intervenant dans l'intérêt des contribuables.
En revanche, s'il s'agit d'une disposition prévoyant l'exonération ou édictant l'imposition - ou un mode spécial d'imposition - des profits résultant de certaines opérations particulières, elle ne peut trouver son application qu'à l'égard des opérations effectuées après la date d'entrée en vigueur de la loi ou du décret.
b. Mise en application des dispositions fiscales relatives aux impôts directs locaux
260
En ce qui concerne les impositions perçues au profit des collectivités locales, il convient de prendre en considération pour l'établissement de l'impôt, la législation applicable au 1er janvier de l'année d'imposition et non celle en vigueur à la date de mise en recouvrement du rôle.
C. Principe et limites de la non-rétroactivité des lois en matière fiscale
270
Lorsque, à l'égard d'une situation juridique déterminée survient un changement de législation, il peut y avoir conflit entre la loi ancienne et la loi nouvelle si des mesures transitoires ne sont pas prévues.
280
En doctrine, trois solutions sont possibles :
- la loi nouvelle s'applique à la situation juridique préexistante dès le moment où celle-ci a pris naissance de telle sorte que tous les effets produits sous le régime de la loi ancienne sont effacés ; la loi nouvelle est alors rétroactive ;
- il peut être décidé, à l'inverse que, s'effaçant devant la loi ancienne, la loi nouvelle ne s'appliquera pas à la situation juridique préexistante ; il y a alors maintien des effets de la loi ancienne ;
- enfin, il peut être prévu une application distributive des deux lois : les effets produits par la loi ancienne sont maintenus mais dès le moment de son entrée en vigueur, la loi nouvelle s'applique à la situation juridique préexistante pour en tirer des effets nouveaux ; la loi nouvelle a alors un effet dit immédiat.
290
Mais le principe établi par l'article 2 du code civil est que la loi ne dispose que pour l'avenir, elle n'a point d'effet rétroactif.
D'une manière générale, cette règle s'applique en matière fiscale.
Par conséquent, un impôt nouveau ne peut être perçu que tout autant que le fait générateur de cet impôt s'est produit sous le régime de la loi nouvelle.
Inversement, lorsqu'un impôt se trouve réduit ou supprimé, les droits qui étaient devenus légalement exigibles sous le régime de la loi ancienne restent acquis au Trésor.
Le I de l'article 35 de la loi 86-1317 du 30 décembre 1986 portant loi de finances pour 1987 entrée en vigueur le 1er janvier 1987, qui abroge les articles 564 septies et 564 octies du CGI visant la taxe sur les appareils automatiques n'a d'effet que pour l'avenir. En conséquence, les juges civils ne peuvent considérer que les créances de taxe d'État afférentes aux années antérieures à son abrogation sont éteintes (Cass com. arrêt du 2 mai 1990 n° 88-13489).
En l'espèce, la redevable sollicitait la décharge de la taxe sur les appareils automatiques due depuis l'entrée en vigueur de la taxe sur la valeur ajoutée sur les recettes des appareils. À la suite du rejet de ses réclamations par le Directeur des services fiscaux, elle avait assigné celui-ci devant le tribunal de grande instance. Les premiers juges avaient accordé satisfaction à la demanderesse au motif que la taxe sur les appareils automatiques avait été abrogée. Cette décision a été cassée sur le pourvoi de l'administration.
Le I de l'article 35 de la loi du 30 décembre 1986 précitée , entré en vigueur le 1er janvier 1987 et qui abroge les articles 564 septies et 564 octies du CGI ne comporte pas de dispositions rétroactives. Aussi son application dans le temps est-elle déterminée par les principes posés à l'article 2 du code civil qui prévoit que la loi ne dispose que pour l'avenir et n'a pas d'effet rétroactif.
Dans ces conditions, l'abrogation de la taxe d'État ne peut avoir pour effet d'effacer les créances que possède l'Administration sur les redevables qui ne s'en sont pas acquittés au titre des années antérieures à 1987.
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Cette règle de non-rétroactivité de la loi nouvelle s'applique également en matière de déchéance d'un régime de faveur (s'agissant plus particulièrement de la mise en œuvre de la déchéance du régime de faveur des marchands de bien dans le cadre d'une procédure de contrôle, se reporter au BOI-ENR-DMTOI-10-50 au II § 105).
Ainsi, la Cour de cassation a rappelé que si la loi nouvelle s'applique immédiatement aux effets à venir des situations juridiques non contractuelles en cours au moment où elle entre en vigueur, elle ne peut remettre en cause les obligations régulièrement nées à cette date (Cass. Com., 7 juin 2011, pourvoi n° 10-18860, Cass. Com., 3 mai 2012, pourvoi n° 11-14820).
En l'espèce, le requérant sollicitait la décharge de l'imposition relative à la déchéance du régime de faveur des marchands de biens pour défaut de tenue régulière du répertoire en raison de la suppression de cette obligation par la loi du 9 mars 2010.
La Haute juridiction confirme la position de l'administration en jugeant que la sanction trouvait encore à s'appliquer malgré l'entrée en vigueur de la loi nouvelle car, à la date du fait générateur de l'impôt, le bénéfice du régime de faveur était subordonnée à la tenue régulière du répertoire.
300
Le principe de non-rétroactivité trouve particulièrement à s'appliquer en matière de contributions indirectes - à moins de dispositions contraires formellement exprimées :
- aux textes fiscaux et économiques pénalement sanctionnés même s'ils comportent des dispositions bienveillantes (Cass crim. arrêt du 18 mars 1965 n° 64-91110 et Cass crim. arrêt du 10 novembre 1970 n° 70-90044) ;
- aux règlements communautaires pris par le Conseil et la Commission des Communautés Européennes (Cass crim. arrêt du 9 janvier 1974 n° 73-90789 et Cass crim. arrêt du 22 novembre 1973 n° 72-90786).
310
Cependant, le principe de non-rétroactivité n'étant pas d'origine constitutionnelle, le législateur peut, dans le cadre de sa souveraineté et par une disposition expresse, y déroger.
Exemple :
L'article 2 de la loi n° 86-966 du 18 août 1986 avait institué au profit de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés, une contribution égale à 0,4 % des revenus imposables des personnes physiques de 1985 et 1986.
L'article 24 de la loi n° 89-18 du 13 janvier 1989 portant diverses mesures d'ordre social avait reconduit ce dispositif pour un an. La contribution, sous réserve de quelques modifications, s'appliquait ainsi aux revenus de l'année 1987.
Toutefois le Conseil Constitutionnel a jugé que le principe de non-rétroactivité de la loi répressive d'incrimination plus sévère avait valeur constitutionnelle en matière de sanctions.
II. Textes fiscaux applicables dans l'espace
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Le principe fondamental est que la souveraineté de chaque État s'exerce pleinement sur son territoire et n'a pas d'effet sur le territoire d'un autre État. Chaque souveraineté ne peut légiférer, réglementer ou poursuivre que dans les limites de son propre territoire.
Les articles 1 et 3 du code civil disposent ainsi d'une manière générale, que les lois sont exécutoires sur tout le territoire français; elles obligent tous ceux qui habitent le territoire et régissent tous les biens meubles et immeubles qui se trouvent sur le territoire.
À cet égard, le Conseil d'État a jugé (CE arrêt du 11 décembre 1974 n° 93637) que le CGI qui, sauf dispositions particulières, est exécutoire sur l'ensemble du territoire national en vertu de l'article 1 du code civil, est applicable au département du Morbihan alors que, d'autre part, l'article 10 du décret de l'Assemblée Nationale constituante des 4, 6, 7 et 11 août 1789 a aboli les dispositions de l'Ancien Régime qui auraient prévu le consentement à l'impôt des « États de Bretagne ».
Le territoire national est constitué par la France continentale, la Corse et les collectivités territoriales d'outre-mer, qui regroupent notamment les départements d'outre-mer (DOM) et les anciens territoires d'outre-mer (TOM).
Remarque : Les collectivités territoriales d'outre-mer peuvent avoir des régimes particuliers suivants les impôts.
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Le principe de territorialité s'applique à la législation fiscale. Il en va notamment ainsi :
- en matière d'impôt sur le revenu : les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. Celles dont le domicile est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française (loi n° 76-1234 du 29 décembre 1976, art. 1) ;
- en matière d'impôt sur les sociétés : en application du 1er alinéa du I de l'article 209 du CGI, les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés « en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France, de ceux mentionnés au a, e à e ter du I de l'article 164 B du CGI ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions » ;
- en matière de taxe sur la valeur ajoutée : le lieu d'imposition des opérations taxables est déterminé par les articles 258 du CGI à 259 D du CGI.
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Toutefois, la règle de la territorialité comporte certains assouplissements.
Tout d'abord, la législation fiscale ne s'applique pas toujours dans les mêmes conditions à tout le territoire soumis à la souveraineté de l'État. C'est ainsi que des tarifs spéciaux existent pour les départements d'outre-mer.
Ensuite, l'application territoriale de la législation interne, en particulier en matière d'impôt sur le revenu, peut se trouver modifiée par les conventions conclues par la France avec certains Etats étrangers à l'effet d'éviter les doubles impositions.
L'existence de ces conventions déroge au principe général de territorialité en tant qu'elles permettent d'affranchir de l'impôt français un revenu normalement passible de cet impôt et inversement d'assujettir en France des revenus dont l'imposition n'est en principe pas prévue par la législation interne du pays (BOI-CTX-DG-20-10-30).