CTX - La juridiction gracieuse - Demandes gracieuses de transaction, modération ou remise - Voies de recours à l'encontre des décisions prises sur demandes gracieuses
1
En application de l'article R247-7 du LPF, les décisions de rejet total ou partiel prises par les directeurs et les agents délégataires sur les demandes gracieuses des contribuables peuvent être soumises au ministre chargé du budget. Ces recours sont spécialement désignés sous le nom de « pourvois » (cf. I).
10
Dans un souci de simplification et de déconcentration des travaux du contentieux, les directeurs des finances publiques et les directeurs chargés d'une direction spécialisée ou d'un service à compétence nationale peuvent prendre eux-mêmes les décisions sur les pourvois formés contre les décisions initiales prises par les agents délégataires dans la limite des compétences fixées par l'article R247-4 du LPF (cf. II).
20
Quant aux décisions relevant de la compétence du ministre, elles peuvent faire l'objet d'un pourvoi devant cette même autorité, mais seulement si des faits nouveaux sont apparus (cf. III).
30
Enfin, ce n'est que dans des cas très exceptionnels qu'une décision refusant une remise gracieuse peut être déférée à la juridiction administrative (cf. IV).
I. Pourvois contre les décisions du directeur
40
Le ministre peut être saisi de recours contre toutes les décisions des directeurs (directeurs des finances publiques ou directeurs chargés d'une direction spécialisée ou d'un service à compétence nationale) intervenues sur les demandes ressortissant à la juridiction gracieuse, que celles-ci tendent à obtenir une transaction ou une remise ou modération.
À cet égard, il est précisé qu'il convient, en principe, de considérer comme un pourvoi toute demande mettant explicitement en cause une décision prise par le directeur. Le directeur reçoit les pourvois soit de la Direction générale à qui ils sont parvenus, soit de leurs auteurs qui les lui ont adressés directement.
50
Aucune forme et aucun délai ne sont impartis pour la présentation de pourvois faisant suite à des demandes purement gracieuses de transaction ou de remise ou modération.
Dans tous les cas où un pourvoi est introduit par un tiers, celui-ci doit, en principe justifier d'un mandat régulier.
L'absence de mandat ne doit cependant pas conduire au rejet de ces demandes. Il en est ainsi en cas de demandes présentées au nom des contribuables par des parlementaires ou d'autres personnalités.
Les pourvois sont soumis à l'instruction dans les mêmes conditions que les demandes initiales (cf. BOI-CTX-GCX-10-30-30).
60
Si, après instruction du pourvoi, le directeur estime que la demande initiale aurait dû être accueillie, en tout ou en partie, il revient sur sa décision, sans avoir besoin de saisir au préalable la Direction générale, et notifie sa nouvelle décision au contribuable qui a, ainsi, un nouveau droit de recours.
70
Lorsqu'il maintient sa décision et que l'affaire doit être soumise à la décision du ministre, le directeur, après avoir consigné les résultats de l'instruction et ses propositions motivées dans un rapport circonstancié, envoie le dossier à la Direction générale.
La décision prise par le ministre est portée à la connaissance du directeur qui la notifie à l'intéressé et en assure l'exécution.
80
Lorsqu'un pourvoi est formé par un redevable qui avait déjà accepté des propositions de transaction et qu'il apparaît, après instruction de ce pourvoi, qu'une nouvelle atténuation des pénalités peut être accordée, trois cas sont à considérer :
- la transaction n'est pas définitive et le délai de réclamation ou de recours n'est pas encore expiré : dans ce cas, de nouvelles conditions de transaction sont notifiées au contribuable ;
- la transaction n'est pas définitive mais le délai de réclamation ou de recours est expiré : dans ces conditions, il est procédé par voie de remise ou modération ;
- la transaction est définitive : il est également procédé par voie de remise ou modération.
II. Pourvois contre les décisions du service
90
Le dispositif consistant à autoriser les directeurs des finances publiques et les directeurs chargés d'une direction spécialisée ou d'un service à compétence nationale à prendre eux-mêmes les décisions sur les pourvois contre les décisions gracieuses prises par les agents délégataires, dans la limite des compétences fixées par les articles R247-4 et R247-5 du LPF, est fondé sur le droit qu'ont les redevables de demander, sans condition de délai, que leur situation soit examinée à nouveau sur le plan gracieux. Les pourvois, dont le traitement est désormais inclus dans la sphère de compétence des directeurs, sont donc considérés comme des demandes nouvelles.
100
Cette mesure trouve à s'appliquer à toutes les demandes gracieuses consécutives à des décisions primitives de rejet total ou partiel prises par les agents délégataires.
Sous le vocable d'agent délégataire, il convient d'entendre les agents des catégories A ou B des services territoriaux et des services de direction (y compris les administrateurs des finances publiques et les administrateurs des finances publiques adjoints) disposant de la délégation de signature consentie par les directeurs en application de l'article 410 de l'annexe II au CGI.
110
Comme pour les demandes primitives, les recours gracieux doivent être soumis à l'instruction. L'agent chargé de l'instruction ou son remplaçant formule son avis sur la suite susceptible d'être réservée à chaque demande. Il ne lui appartient pas de prendre la décision sur le pourvoi, et il ne doit donc pas faire usage, dans ce cas, de la délégation de signature dont il peut disposer même s'il a pris la décision initiale de rejet.
120
Les pourvois formés contre une décision gracieuse de rejet primitive prise par un agent délégataire sont examinés à la direction comme s'il s'agissait d'une première demande sauf à soumettre la décision à intervenir à la signature du directeur ou à celle de l'administrateur des finances publiques.
Lorsque la décision initiale de rejet a été prise par un agent délégataire exerçant ses fonctions dans les services de direction (administrateurs des finances publiques, administrateurs des finances publiques adjoints, rédacteurs), ce dernier formule au préalable, comme l'agent chargé de l'instruction, son avis sur la suite susceptible d'être réservée à la demande.
Il appartient alors au directeur de statuer. Toutefois, le directeur a la possibilité de transmettre, à la Direction générale, selon la procédure des pourvois visée ci-dessus (cf. I), les demandes sur lesquelles il souhaiterait qu'une décision soit prise en raison des difficultés qu'elles soulèvent. Mais ces transmissions doivent revêtir un caractère exceptionnel.
130
Les décisions sont notifiées aux contribuables par le directeur, exécutées dans les conditions habituelles et portées à la connaissance du service du recouvrement.
III. Recours au ministre mieux informé
140
Si, une décision ayant été prise par le ministre chargé du budget, des faits nouveaux se sont produits depuis cette décision, les contribuables sont admis à former un recours à l'autorité même qui a statué.
Ce recours est instruit suivant les règles exposées ci-dessus pour les pourvois (cf. I) étant entendu que le dossier est dans tous les cas transmis à la Direction générale.
IV. Recours devant la juridiction administrative
150
La juridiction administrative n'est pas compétente pour prononcer directement des remises ou modérations gracieuses non plus que des transactions sur pénalités.
160
Seule l'Administration peut prendre des décisions de cette nature mais elle n'y est pas tenue et n'a pas à motiver les décisions qu'elle notifie aux contribuables dans l'exercice de la juridiction gracieuse.
170
Par ailleurs, ces décisions ne peuvent pas être contestées devant le juge de l'impôt dans le cadre général du « plein contentieux » mais seulement dans celui, plus restreint, du « contentieux de l'annulation », c'est-à-dire par la voie du recours pour excès de pouvoir.
180
Dans le cadre, du « plein contentieux » le juge de l'impôt n'a pas qualité pour connaître des demandes tendant à la remise ou la modération d'impôts qui relèvent de la juridiction gracieuse (Conseil d'État, arrêt du 3 juillet 1970, n° 79300).
Les décisions prises par le directeur sur les demandes en dégrèvement gracieux ne sont susceptibles que d'un recours devant le directeur général des impôts statuant en dernier ressort. Un contribuable n'est dès lors pas fondé à soutenir que le tribunal administratif s'est déclaré à tort incompétent pour statuer sur les conclusions relatives à la modération accordée par le directeur départemental, ni à demander au Conseil d'État de connaître desdites conclusions (CE, 16 juillet 1976, req. n° 00240).
La circonstance que la décision par laquelle le directeur a rejeté la demande d'un contribuable tendant à la remise ou à la modération de son imposition était rédigée comme en matière contentieuse (au motif en l'espèce que ladite demande ne comportait ni la signature de l'intéressé, ni l'exposé des faits et moyens) n'est pas de nature à modifier le caractère gracieux de la demande dont il s'agit ni à permettre au contribuable de former contre la décision en cause une demande en décharge ou en réduction de l'imposition devant le tribunal administratif (Conseil d'État, arrêt du 18 décembre 1970, n° 75639).
190
Par contre, la circonstance que les décisions prises par le directeur sur les demandes des contribuables tendant à obtenir, à titre gracieux, une remise ou une modération de leurs impositions sont susceptibles de recours devant le directeur général, ne fait pas obstacle à ce qu'elles soient attaquées devant le tribunal administratif par la voie du recours pour excès de pouvoir (Conseil d'État, arrêts des 16 juillet 1976, n° 00240 et 16 juin 1986, n° 46743).
Remarque : Jurisprudences rendues sous l'empire des anciennes dispositions de l'article R247-7 du LPF. Depuis le 1er janvier 1998, les recours contre les décisions du directeur relèvent du ministre chargé du budget et non plus du directeur général.
Il appartient au contribuable de démontrer, dans le cadre de cette procédure, l'illégalité éventuelle de la décision attaquée.
Le refus de l'Administration d'accorder une remise ou une modération ne peut être annulée que si cette décision, qui n'a pas à être motivée, est entachée d'une erreur de droit, d'une erreur de fait, d'une erreur manifeste d'appréciation ou si elle est révélatrice d'un détournement de pouvoir.
C'est ainsi qu'en cas de demande fondée sur la gêne ou l'indigence, le juge de l'excès de pouvoir examine notamment si l'Administration n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation quant à la possibilité pour le contribuable de se libérer de sa dette fiscale compte tenu de ses facultés contributives.