CF - Obligations des contribuables tendant à la prévention de la fraude - Déclaration de dispositifs transfrontières - Précisions sur les marqueurs généraux et spécifiques - Marqueurs généraux et spécifiques liés au critère de l'avantage principal
Les commentaires contenus dans le présent document font l'objet d'une consultation publique du 29 avril 2020 au 31 mai 2020 inclus. Vous pouvez adresser vos remarques à l'adresse de messagerie bureau.cf1c@dgfip.finances.gouv.fr. Seules les contributions signées seront examinées. Ce document est donc susceptible d'être révisé à l'issue de la consultation. Il est néanmoins opposable dès sa publication.
I. Marqueurs généraux liés au critère de l’avantage principal
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Les marqueurs généraux relevant de la catégorie A mentionnée au A du II de l'article 1649 AH du CGI ne peuvent être pris en compte que lorsqu’ils remplissent le « critère de l'avantage principal » (III-B-1 §120 BOI-CF-CPF-30-40-10-10).
A. Marqueur A.1.
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Marqueur A.1 : Un dispositif dans lequel le contribuable concerné ou un participant au dispositif s’engage à respecter une clause de confidentialité selon laquelle il peut lui être demandé de ne pas divulguer à d’autres intermédiaires ou aux autorités fiscales comment le dispositif pourrait procurer un avantage fiscal.
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Le dispositif est proposé au contribuable concerné par un intermédiaire sous condition de confidentialité.
Cette condition implique que le contribuable concerné ne peut divulguer aux tiers des informations considérées comme confidentielles qui se rapportent à l’ingénierie fiscale du dispositif permettant à l’utilisateur d’obtenir un avantage fiscal.
Le marqueur vise les accords qui interdisent notamment la divulgation du dispositif à d’autres intermédiaires ou à l’administration fiscale. Une clause de confidentialité générale interdisant la divulgation du dispositif à des tiers sans mention expresse de l’administration fiscale ou d’autres intermédiaires répond également au marqueur A.1.
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La condition de confidentialité est notamment satisfaite dans les circonstances suivantes :
- signature d'un accord de confidentialité ;
- ou correspondance écrite (type lettre ou courriel) mentionnant une obligation explicite ou implicite de ne pas divulguer ou partager les caractéristiques du dispositif ;
- ou si la preuve est apportée qu’un accord verbal ou écrit a été donné sur une obligation de confidentialité.
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Ne sont pas visées par le marqueur A.1. :
- une clause de confidentialité visant à protéger un secret commercial, industriel ou professionnel ;
- les obligations légales et déontologiques trouvant à s'appliquer en matière de confidentialité.
B. Marqueur A.2.
50
Marqueur A.2. : Un dispositif dans lequel l’intermédiaire est en droit de percevoir des honoraires, intérêts ou rémunération pour financer les coûts et autres frais, pour le dispositif et ces honoraires, intérêts ou rémunération sont fixés par référence :
- au montant de l’avantage fiscal découlant du dispositif ;
- ou au fait qu’un avantage fiscal découle effectivement du dispositif. Cela peut inclure une obligation pour l’intermédiaire de rembourser partiellement ou entièrement les honoraires si l’avantage fiscal escompté découlant du dispositif n’a pas été complètement ou partiellement généré.
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Le marqueur vise les dispositifs pour lesquels la rémunération de l’intermédiaire dépend de certains facteurs tels que le montant de l’avantage fiscal retiré du dispositif, ou l'obtention effective d'un avantage fiscal induit par le dispositif.
Exemple : Le montant des honoraires d’un avocat fiscaliste est calculé sur la base d’un pourcentage de l’économie d’impôt réalisée grâce au dispositif.
70
Sont concernés tous les dispositifs qui présentent un lien direct entre les avantages fiscaux obtenus par le contribuable concerné et les honoraires facturés par l'intermédiaire à son client.
C. Marqueur A.3.
80
Marqueur A.3. : Un dispositif dont la documentation et/ ou la structure sont en grande partie normalisées et qui est à la disposition de plus d’un contribuable concerné sans avoir besoin d’être adapté de façon importante pour être mis en œuvre.
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La documentation du dispositif est en grande partie normalisée, ce qui rend le dispositif disponible pour plusieurs contribuables concernés sans qu’il soit nécessaire de l’adapter de façon importante.
Ce marqueur vise les dispositifs auxquels plusieurs personnes peuvent avoir accès, assortis d’une documentation standardisée qui n’a pas été adaptée de manière significative pour tenir compte de la situation du contribuable concerné. Ces dispositifs peuvent notamment être mis en œuvre par le contribuable une fois la documentation ou la structure nécessaires à son fonctionnement mis à disposition, sans qu’un accompagnement particulier soit nécessaire.
100
Exemple : M. X (personne physique domiciliée fiscalement en France) ouvre un plan d'épargne en actions (PEA) auprès d'une entreprise d'investissement établie dans un Etat A habilitée à gérer des PEA. Il y fait inscrire des titres d'une société non cotée établie dans un État B (« société B ») appartenant au groupe de la société établie en France (« société A ») dans laquelle il exerce une activité salariée de directeur des achats.
Les principaux cadres du groupe peuvent souscrire aux parts sociales de la société B à leur valeur nominale. Les actions ainsi acquises bénéficient d'une promesse d'achat de la part de la société B après trois ans de détention, à un prix dépendant du taux de rendement interne atteint par le groupe pendant cette période. En cas de départ du cadre pour cause de démission ou licenciement, le prix de rachat est plafonné à la valeur de souscription des actions.
Le plan d'actionnariat des cadres du groupe a été conçu et réalisé par un cabinet d'avocats établi en France et inclut la constitution de la société B. Le cabinet a conseillé aux cadres de placer leurs actions de B sur un PEA, mais leur a laissé le soin de choisir chacun leur banque gestionnaire et de réaliser les démarches avec elle. La banque établie dans l’État A a procédé à l'inscription des titres non cotés de la société B.
Cet exemple comprend plusieurs dispositifs :
- Le dispositif lié à la souscription du PEA
Le dispositif est transfrontière : M. X est résident fiscal en France. L'entreprise d'investissement à laquelle il fait appel est établie dans un autre Etat.
Du fait de son accessibilité ainsi que de sa documentation normalisée, le PEA répond a priori aux critères du marqueur A.3. Toutefois, ce dispositif exonéré a été conçu par le législateur pour encourager les ménages à constituer une épargne de long-terme et orienter celle-ci vers les entreprises, afin notamment d'en favoriser les fonds propres. Cet objectif est réputé constituer également l'objectif principal du souscripteur.
Conclusion : Le dispositif lié à la souscription du PEA revêt les caractéristiques du marqueur A.3. Toutefois, il ne répond pas au critère de l’avantage fiscal principal.
- Le dispositif d'actionnariat salarié
Il s'agit d'un dispositif transfrontière : M. X d'une part, et la société B d'autre part sont établis dans deux États membres différents.
Le dispositif d'actionnariat salarié a pour objectif principal d'atténuer l'imposition de la rémunération des cadres. Il répond au critère de l'avantage principal et réunit les caractéristiques des marqueurs suivants :
- A.3 : Le dispositif d'actionnariat salarié destiné à transformer des salaires en plus-value est standardisé à destination des cadres du groupe ;
- B.2 : Conversion d'un salaire en un gain en capital moins lourdement imposé (taux forfaitaire, voire exonération avec le PEA, au lieu du barème progressif).
Conclusion : Le dispositif d'actionnariat salarié revêt les caractéristiques du marqueur A.3. et du marqueur B.2.
1. Cas particulier de certains produits bancaires et financiers reposant sur une documentation normalisée
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De nombreux produits, instruments et opérations bancaires sont proposés à un large public sur le fondement d'une documentation normalisée. Ils répondent par conséquent aux caractéristiques énoncées au marqueur A.3.
Toutefois, en l'absence d'autres marqueurs prévus par l'article 1649 AH du CGI, et sous réserve que l’avantage fiscal retiré soit prévu par la loi française et que l’utilisation de ces produits soit conforme à l’intention du législateur, les dispositifs qui comprendraient de tels produits, instruments et opérations bancaires ne doivent pas faire l'objet d’une déclaration.
2. Cas particulier des produits d'épargne réglementée (Livret A, Livret de développement durable et solidaire [LDDS], Plan épargne logement [PEL], Compte épargne logement [CEL], etc.) détenus par un non-résident
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Ces produits répondent aux caractéristiques énoncées au marqueur A.3. toutefois, ils ne satisfont pas au critère de l'avantage fiscal principal dès lors que :
- l’avantage fiscal qui y est rattaché a été institué par le législateur français ;
- l’utilisation qui en est faite est conforme à l’intention du législateur.
Dans ces conditions, ces produits ne sont a priori pas soumis à l'obligation déclarative prévue aux article 1649 AD et suivants du CGI.
3. Cas particulier des investissements dans des organismes de placement collectif (OPC)
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La souscription à un fonds destiné à une large pluralité d’investisseurs n’est a priori pas déclarable au titre du marqueur A.3, dès lors que :
- l’obtention d’un avantage fiscal principal n’est pas, en principe, l’objectif principal du fonds ;
- et qu’il n’est pas lui-même structuré via l’utilisation d’un dispositif transfrontière répondant aux caractéristiques des marqueurs prévus par l'article 1649 AH du CGI.
Doit en revanche faire l'objet d'une déclaration toute opération de structuration du passif ou de l’actif du fonds relevant d’un des marqueurs prévus à l’article 1649 AH du CGI.
II. Marqueurs spécifiques liés au critère de l’avantage principal
140
Les marqueurs spécifiques relevant de la catégorie B mentionnée au B du II de l'article 1649 AH du CGI et de la catégorie C pour les cas mentionnés aux b)-i), c) et d) du 1° du C du II de l'article 1649 AH du CGI ne peuvent être pris en compte que lorsqu’ils « remplissent le critère de l'avantage principal » (III-B-1 §120 BOI-CF-CPF-30-40-10-10).
A. Marqueur B.1.
150
Marqueur B.1. : Un dispositif dans lequel un participant au dispositif prend artificiellement des mesures qui consistent à acquérir une société réalisant des pertes, à mettre fin à l’activité principale de cette société et à utiliser les pertes de celle-ci pour réduire sa charge fiscale, y compris par le transfert de ces pertes à une autre juridiction ou par l’accélération de l’utilisation de ces pertes.
160
Un participant à un dispositif procède, par des mesures artificielles, à l’acquisition directe ou indirecte d’une société réalisant des pertes afin de les utiliser pour réduire sa charge fiscale.
Les mesures présentent un caractère artificiel lorsqu’elles revêtent un caractère non authentique. Des mesures sont considérées comme non authentiques dans la mesure où elles ne sont pas mises en place pour des motifs commerciaux valables qui reflètent la réalité économique (I-B § 40 à 60 du BOI-IS-BASE-70).
B. Marqueur B.2.
170
Marqueur B.2. : Un dispositif qui a pour effet de convertir des revenus en capital, en dons ou en d’autres catégories de recettes qui sont taxées à un niveau inférieur ou ne sont pas taxées.
180
Ce marqueur vise les dispositifs transfrontières permettant de convertir des bénéfices en capital, en dons ou en toute autre catégorie de revenus et qui ont pour effet l’application d’une imposition moindre ou nulle.
Exemple 1 : La société F établie en France, holding d'un groupe opérationnel français, reçoit des prestations de conseil qui contribuent à la création de valeur du groupe. Ces prestations sont rendues par des professionnels indépendants exerçant en libéral dont les recettes sont normalement imposées à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC) en tant que contribuables fiscalement domiciliés en France.
Les prestataires détiennent les parts de la société holding A, établie dans un autre État-membre de l'Union européenne (UE). Celle-ci souscrit à une augmentation de capital en actions de préférence (à la valeur nominale) de la société holding B, établie dans un troisième État de l'UE.
B détient des actions de préférence de la holding F du groupe français opérationnel auquel les prestations ont été rendues.
B perçoit, au titre des actions de préférence qu’elle détient, un dividende privilégié de F, lui-même redistribué à A.
Le mécanisme ainsi mis en place permet aux contribuables à l'origine des prestations délivrées à F d'être rémunérés, sous couvert de dividendes encaissés par A, des prestations qui ont contribué à la création de valeur du groupe français :
- sans imposition effective lors de la distribution à A ;
- les éventuelles distributions subséquentes de A à ses associés français étant par ailleurs imposées à un taux effectif moindre que l'imposition de leurs bénéfices non commerciaux.
Conclusion : Ce dispositif revêt les caractéristiques du marqueur B.2.
Exemple 2 : Un contribuable domicilié fiscalement en France place des actifs de source française sur un contrat d’assurance-vie souscrit dans un État B, ayant pour conséquence d’exonérer d’impôt sur le revenu les gains afférents aux placements financiers réalisés dans ce cadre.
Le fonctionnement d’un contrat d’assurance-vie suppose un dessaisissement des fonds versés au profit de l’assureur qui les gère ensuite de façon autonome. Or, contrairement à l’apparence donnée par les actes juridiques passés, le contribuable conserve en réalité et ce, dès la souscription du contrat, la gestion des montants investis, qui sont utilisés pour souscrire à des obligations d’une société qu’il contrôle.
Ce schéma permet de transformer des revenus en principe imposables en France au nom de la personne physique, en revenus perçus et exonérés dans l’État-membre où l'assurance-vie a été souscrite.
Conclusion : Ce dispositif revêt les caractéristiques du marqueur B.2.
Exemple 3 : La société A établie en France détient à 100 % la société B établie dans l’État membre Y. A accorde un financement obligataire à B.
Les obligations sont accompagnées d’une option de conversion avec pour objectif :
- de permettre à B de déduire pour le calcul de l’impôt sur les bénéfices dû dans l’État Y les intérêts versés à A ainsi que l’amortissement d’une prime de conversion calculée selon un modèle probabiliste ;
- et de n’imposer en France que le seul produit correspondant aux intérêts reçus par A.
L’avantage principal attendu du dispositif correspond à la transformation partielle des intérêts, qui auraient été dus sur des obligations ordinaires, en une prime qui, quoi qu’il arrive et dès lors que A est déjà l’actionnaire unique de B, sera intégralement compensée par la perte réalisée sur les actions déjà détenues par A dans B, du fait de la dilution de la valeur de la participation d’origine de A au capital de B. La composante dette du financement et les intérêts imposables en France se trouvent ainsi minorés.
Conclusion : Ce dispositif revêt les caractéristiques du marqueur B.2.
C. Marqueur B.3.
190
Marqueur B.3. : Un dispositif qui inclut des transactions circulaires ayant pour résultat un « carrousel » de fonds, à savoir au moyen d’entités interposées sans fonction commerciale primaire ou d’opérations qui se compensent ou s’annulent mutuellement ou qui ont d’autres caractéristiques similaires.
200
Le marqueur B.3. vise les dispositifs comportant des transactions entraînant un mouvement circulaire de fonds qui remplissent par ailleurs l'une au moins des trois conditions suivantes :
- Présence d'entités interposées sans fonction commerciale principale dans le dispositif ;
- Présence de transactions qui se compensent ou s'annulent mutuellement ;
- Présence d'autres caractéristiques équivalentes.
210
La transaction circulaire consiste par conséquent en un aller-retour des fonds sans motif commercial primordial, ou qui aboutit à une neutralisation des transactions, ou qui présente des caractéristiques similaires.
220
Ce marqueur vise généralement des dispositifs dans lesquels les fonds provenant d'un État-membre transitent via des sociétés-relais établies dans des juridictions étrangères (dans et hors de l'UE) afin d'y bénéficier d'un traitement fiscal avantageux (convention fiscale ou autres avantages similaires) et retournent dans l’État-membre d'origine.
Exemple : Une société A établie en France développe un procédé de fabrication qu’elle fait breveter. A met en place un contrat d’exploitation de la licence relatif à cette technologie auprès d'une société C établie dans un autre État-membre. Du fait du caractère non exclusif et limité dans le temps du contrat de licence, le montant de la redevance versée par C à A, déterminé selon les règles de prix transfert applicables, est plutôt faible.
C utilise le procédé de fabrication pour fabriquer un produit et revend celui-ci à A à un prix de marché élevé. A revend ensuite le produit fini en réalisant une marge commerciale fortement impactée par les transactions relatives à la redevance. La marge commerciale imposable ainsi réalisée par A a été minorée grâce à l’intervention de C dans le procédé de fabrication, du fait des opérations qui se compensent mutuellement.
Conclusion : Ce dispositif revêt les caractéristiques du marqueur B.3.