Date de début de publication du BOI : 18/03/2014
Date de fin de publication du BOI : 02/06/2016
Identifiant juridique : BOI-ENR-DMTG-10-20-30-20

ENR - Mutations à titre gratuit - Successions - Champ d'application des droits de mutation par décès - Exonérations en raison de la nature des biens transmis - Bien rural donné à bail à long terme

1

Le bail à long terme répond à la nécessité de mieux assurer la sécurité et la stabilité du preneur d'un bien rural donné à bail, en le garantissant contre toute reprise du propriétaire pendant une période de dix-huit ans, pour que les investissements réalisés au début de bail soient amortis à l'expiration de celui-ci. Il s'inscrit dans le cadre de la politique de développement des baux dont l'objectif est de décharger l'exploitant du poids de l'investissement foncier.

Pour, d'une part, établir un équilibre entre les intérêts du bailleur à long terme et ceux du preneur et, d'autre part, encourager les propriétaires à conclure des baux de ce type, des avantages fiscaux ont été accordés aux bailleurs. Parmi ces avantages figure l'exonération partielle de droits de mutation à titre gratuit pour les biens donnés à bail à long terme lors de leur première mutation à titre gratuit.

10

Ainsi aux termes du 3° du 2 de l'article 793 du code général des impôts (CGI) sont exonérés de droits de mutation à titre gratuit à concurrence des trois quarts de leur valeur, les biens donnés à bail à long terme dans les conditions prévues de l'article L. 416-1 du code rural et de la pêche maritime à l'article L. 416-6 du code rural et de la pêche maritime, à l'article L. 416-8 du code rural et de la pêche maritime, à l'article L. 416-9 du code rural et de la pêche maritime, et de l'article L. 418-1 du code rural et de la pêche maritime à l'article L. 418-5 du code rural et de la pêche maritime.

Toutefois, lorsque la valeur totale des biens en cause transmis par le défunt à chaque héritier, donataire ou légataire excède le seuil, mentionné à l'article 793 bis du CGI, l'exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit est ramenée à 50 % au-delà de cette limite.

Remarque : Ce seuil s'établit à 101 897 € pour les donations consenties et les successions ouvertes depuis le 1er janvier 2011.

20

L'exonération des droits de mutation à titre gratuit est subordonnée à la réunion de plusieurs conditions et limitée, ainsi qu'il est énoncé ci-dessus, à une fraction de la valeur des biens transmis. En outre, l'exonération partielle est susceptible d'être remise en cause si les biens exonérés sont aliénés dans les cinq ans de la transmission à titre gratuit.

Le bénéfice du régime de faveur prévu à cet article n'est pas réservé aux cas de transmission à titre gratuit de la pleine propriété d'un bien. Il s'applique aussi en cas de donation de la seule nue-propriété du bien, même si le nu-propriétaire ne peut pas donner ce bien à bail (Cass. com., arrêt du 13 mai 1997, n° 95-16320).

Ces dispositions conduisent à envisager successivement :

- les conditions d'application du régime de faveur ;

- la portée de l'exonération ;

- la déchéance du régime.

I. Conditions d'application du régime de faveur des biens ruraux donnés à bail à long terme

30

L'exonération partielle de droits de mutation à titre gratuit est subordonnée aux conditions suivantes :

- le bien transmis doit constituer un bien rural ;

- il doit faire l'objet d'un bail à long terme ou d'un bail cessible hors du cadre familial au jour de la transmission ;

- il doit rester la propriété du donataire, héritier ou légataire pendant cinq ans à compter de la mutation à titre gratuit ;

- le bail doit avoir été consenti depuis au moins deux ans lorsque le preneur est le donataire ou un membre de sa famille.

Le bien en cause doit constituer un bien rural.

40

Le bail à long terme tel qu'il est défini au chapitre VI du titre Ier du livre IV du code rural et de la pêche maritime (code rural et de la pêche maritime, art. L. 416-1 et suivants) et le bail cessible dans les conditions visées de l'article L. 418-1 du code rural et de la pêche maritime à l'article L. 418-5 du code rural et de la pêche maritime ne sont susceptibles de s'appliquer qu'aux biens ruraux et seuls ces biens peuvent bénéficier de l'exonération de droits de mutation à titre gratuit.

Constitue un immeuble rural l'immeuble principalement affecté à la production de récoltes agricoles ou de fruits naturels ou artificiels : prairies, terres labourables ou vignobles. Présentent également le caractère d'immeubles ruraux les bâtiments d'exploitation et ceux destinés à l'habitation de l'exploitant ou du personnel qui constituent un même ensemble, une unité économique.

Par ailleurs, ces biens peuvent comprendre des immeubles par nature et des immeubles par destination.

A. Le bien doit faire l'objet d'un bail à long terme, ou d'un bail cessible hors du cadre familial, en cours au jour de la transmission

50

Seuls les biens donnés à bail à long terme dans les conditions prévues de l'article L. 416-1 du code rural et de la pêche maritime à l'article L. 416-6 du code rural et de la pêche maritime, à l'article L. 416-8 du code rural et de la pêche maritime et à l'article L. 416-9 du code rural et de la pêche maritime, ainsi que les biens donnés à bail cessible hors du cadre familial dans les conditions prévues de l'article L. 418-1 du code rural et de la pêche maritime à l'article L. 418-5 du code rural et de la pêche maritime sont susceptibles de bénéficier du régime de faveur.

60

L'article L. 411-1 du code rural et de la pêche maritime et l'article L. 411- 2 du code rural et de la pêche maritime n'interdisent pas à des époux de consentir un bail à long terme soumis au statut du fermage à une société constituée entre eux, même en continuant de participer à l'exploitation au sein de celle-ci (Cass. civ., 3ème, 8 octobre 1997, n° 95-19267).

Au cas particulier, des époux avaient consenti un bail à long terme à une société civile d'exploitation agricole (SCEA), constituée entre eux le même jour, portant sur des terres qui étaient la propriété du mari. Suite au décès de celui-ci, quelques semaines après, une déclaration de succession, avec application des dispositions du 3° du 2 de l'article 793 du CGI, a été déposée. Le litige portait, dès lors, sur la définition des biens donnés à bail au regard des conditions relatives aux baux à long terme prévues de l' article L.  416-1 du code rural et de la pêche maritime à l'article L.  416-6 du code rural et de la pêche maritime, à l'article L.  416-8 du code rural et de la pêche maritime et à l'article L.  416-9 du code rural et de la pêche maritime, et du régime de droit commun des baux ruraux, régi par les articles L.  411-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime (aux termes de l'article L. 416-8 du code rural et de la pêche maritime, les dispositions générales relatives aux baux ruraux sont applicables aux baux ruraux à long terme).

Il s'agissait, plus précisément, de déterminer si les conséquences de l'article L 411-2 pouvaient ou non être écartées par une disposition contractuelle. L'administration soutenait, en effet, que le bail en cause, qui entrait incontestablement dans le cadre de l'une des exceptions visées à l'article L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, ne pouvait être soumis au statut du fermage posé par l'article L. 411-1 du code rural et de la pêche maritime  et, puisqu'il n'entrait pas, en conséquence, dans la catégorie des baux à long terme, ne pouvait permettre l'exonération partielle demandée.

Or, le jugement qui confirmait cette position a été annulé par la Cour de cassation au motif que les dispositions combinées des articles L. 411-1 et L. 411-2 susvisés n'interdisent pas de consentir un bail à long terme soumis au statut du fermage dans le cas de biens mis à la disposition d'une société par une personne qui participe effectivement à leur exploitation au sein de celle-ci.

Il est apparu, par conséquent, que l'exception visée à l'article L 411-2 du code rural et de la pêche maritime  ne fait pas obstacle à la volonté des parties de soumettre librement leur convention au statut du fermage.

70

Cas particulier : Baux conclus antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi n° 70-1298 du 31 décembre 1970.

L'exonération s'applique uniquement aux biens ruraux donnés à bail à long terme dans les conditions prévues à l'article premier de la loi. Seuls les baux conclus postérieurement à la publication de la loi n° 70-1298 du 31 décembre 1970 peuvent donc répondre à ces prescriptions. Toutefois :

Sous réserve que les clauses du bail en cours au jour de la mutation a titre gratuit soient conformes aux prévisions de l' article L.  416-1 du code rural [et de la pêche maritime], de l'article L.  416-6 du code rural [et de la pêche maritime] , de l'article L. 416-8 du code rural [et de la pêche maritime] et de l'article L.  416-9 du code rural [et de la pêche maritime]  il pourrait être admis que l'exonération partielle prévue au 3° du 2 de l'article 793 du CGI soit applicable quelle que soit la date de conclusion du bail rural (RM Martin n°38996, JO AN du 2 décembre 1996, p. 6293).

1. Le bail doit être en cours au moment de la transmission

80

Pour bénéficier de l'exonération prévue au 3° du 2 de l'article 793 du CGI, le bail doit notamment être en cours au moment de la mutation, mais peu importe que celle-ci intervienne pendant la durée prévue au contrat initial ou au cours des renouvellements successifs du contrat.

Ainsi, l'exonération s'applique lorsque la mutation intervient à l'expiration du bail à long terme initial mais que la location se poursuit par tacite reconduction conformément aux dispositions de l'article L. 416-1 du code rural et de la pêche maritime et de l'article L. 416-3 du code rural et de la pêche maritime (RM Morisset n°26790, JO AN du 20 juillet 2004, p. 5517).

En revanche, l'exonération ne peut s'appliquer lorsque la transmission intervient avant que le bail ait pris effet.

Tel est le cas lorsque le bailleur décède entre la date de la conclusion du contrat de bail et la date prévue pour l'entrée en jouissance du preneur, puisque la durée de la location n'a pas commencé à courir.

2. Établissement obligatoire d'un état des lieux pour les biens faisant l'objet d'un bail à long terme

90

L'article L. 416-6 du code rural et de la pêche maritime prévoit l'établissement d'un état des lieux conforme aux dispositions de l'article L. 411-4 du code rural et de la pêche maritime.

Toute clause tendant à déroger à ces dispositions est réputée non écrite.

Toutefois, l'administration ne peut pas exciper l'absence de l'état des lieux, avant la transmission, pour refuser le bénéfice de l'exonération.

B. Le bien doit être conservé par le bénéficiaire de la mutation à titre gratuit pendant cinq ans

100

L'article 793 bis du CGI, issu de l'article 22 de la loi n°89-936 du 29 décembre 1989 de finances rectificative pour 1989 subordonne l'application du régime de faveur à la condition que les biens reçus restent la propriété du bénéficiaire de la mutation à titre gratuit pendant une durée minimale de cinq ans.

Le non-respect de la condition de conservation entraîne la déchéance du régime de faveur (cf. ci-après III § 280).

C. Le bail doit avoir été consenti depuis au moins deux ans lorsque le preneur est le donataire ou un membre de sa famille

110

L'article 793 bis du CGI prévoit que l'exonération partielle des mutations à titre gratuit de biens ruraux loués par bail à long terme ou par bail cessible hors du cadre familial ne s'applique pas lorsque le bail a été consenti depuis moins de deux ans :

- au donataire de la transmission, à son conjoint, à un de leurs descendants (BOI-ENR-DMTG-20-20-20) ;

- ou à une société contrôlée par une ou plusieurs de ces personnes.

120

Il en résulte :

- que la condition d'antériorité de deux ans imposée au bail pour que le régime de faveur puisse bénéficier à la transmission des biens ruraux n'est pas exigée en cas de transmission par décès ;

- que les baux consentis depuis moins de deux ans au donataire, à son conjoint, à ses descendants ou à une société contrôlée par une de ces personnes privent la donation de la possibilité de bénéficier du régime de faveur.

130

L'exonération partielle visée au 3° du 2 de l'article 793 du CGI n'est pas applicable dans l'hypothèse où le bail ordinaire a été converti en bail rural à long terme moins de deux ans avant la transmission des biens loués.

L'exonération partielle prévue par le 3° du 2 de l'article 793 du CGI constitue la contrepartie de l'indisponibilité qui résulte, pour le propriétaire du bien et ses ayants cause a titre gratuit, de la conclusion d'un bail à long terme grevant le bien rural pour une durée de dix-huit ans ou vingt-cinq ans. Par ailleurs, les dispositions du dernier alinéa de l'article 793 bis ont pour effet d'interdire les pratiques qui consistaient, avant le 1er juillet 1992, à consentir un bail rural à long terme au futur donataire dans le seul but de le faire bénéficier, à brefs délais, de l'exonération partielle de droits de mutation a titre gratuit. La proposition du parlementaire [qui consiste à appliquer l'exonération partielle aux transmissions de baux ordinaires convertis en baux ruraux à long terme moins de deux ans avant la transmission des biens loués], irait a l'encontre de ces deux préoccupations du législateur en supprimant l'incitation à conclure, suffisamment à l'avance, un bail rural à long terme. De surcroit, il n'y aurait pas de garantie quant à la date ou à la durée du bail ordinaire converti en bail a long terme (RM Dubourg n°24061, JO AN du 21 août 1995 p.3595).

140

La computation du délai de deux ans s'effectue à compter de la date à laquelle le bail a acquis date certaine (date de l'acte s'il s'agit d'un acte authentique, date de l'enregistrement en cas d'acte sous seing privé présenté à la formalité). C'est cette date qu'il convient de prendre en compte, au jour de la donation, pour apprécier si la condition de durée minimum est remplie.

II. Portée de l'exonération

150

Lorsque les conditions d'application sont réunies, les biens ruraux donnés à bail à long terme sont exonérés de droits de mutation à titre gratuit à concurrence d'une certaine fraction.

L'exonération s'applique aussi bien aux transmissions entre vifs qu'à celles résultant du décès de leur propriétaire. Elle bénéficie à tous les héritiers, donataires ou légataires, quel que soit leur degré de parenté avec le donateur ou le défunt et même s'il n'existe aucun lien de parenté entre eux.

160

L'exonération partielle résultant de l'application des dispositions combinées du 3° du 2 de l'article 793 du CGI et de l'article 793 bis du CGI s'applique à toutes les transmissions à titre gratuit successives d'immeubles ruraux loués par bail à long terme ou par bail cessible hors du cadre familial .

A. Limitation de l'exonération en fonction de la valeur des biens transmis

170

L'exonération n'est applicable qu'à concurrence des trois quarts de la valeur des biens loués par bail à long terme ou par bail cessible hors du cadre familial (CGI, art. 793, 2-3°). Toutefois, lorsque cette valeur excède le seuil visé à l'article 793 bis du CGI, l'exonération est ramenée à 50 % pour la fraction excédant cette limite.

Remarque : Le seuil d'exonération s'établit à 101 897 € pour les donations consenties et les successions ouvertes à compter du 1er janvier 2011.

Ces biens doivent donc être évalués selon le droit commun mais seule une fraction de cette valeur est retenue pour l'assiette des droits.

(180)

1. Conditions d'application

190

La limite mentionnée à l'article 793 bis du CGI, au-dessus de laquelle la mutation à titre gratuit des immeubles ruraux loués par bail à long terme ou par bail cessible hors du cadre familial ne bénéficie plus que d'une exonération de moitié au lieu d'une exonération des trois quarts, n'est pas une limite globale. Elle s'apprécie au niveau de chaque part héréditaire ou de chaque légataire s'il s'agit de succession ou de chaque donateur et donataire s'il s'agit de mutation à titre gratuit entre vifs.

Dans l'hypothèse où les biens transmis comprennent à la fois des parts de groupements fonciers agricoles (BOI-ENR-DMTG-10-20-30-30) et des immeubles ruraux loués par bail à long terme ou par bail cessible entrant dans le champ d'application du 4° du 1 et du 3° du 2 de l'article 793 du CGI, la limite prévue à l'article 793 bis du CGI trouve à s'appliquer au titre de chaque catégorie de biens.

2. Appréciation du seuil

200

Pour l'appréciation de la limite visée à l'article 793 bis du CGI au-delà de laquelle l'exonération de droits de mutation à titre gratuit afférente aux biens ruraux loués par bail à long terme ou par bail cessible est ramenée de 75 % à 50 %, il est, en principe, tenu compte de l'ensemble des donations consenties par la même personne à un titre, à une date, ou sous forme quelconque. Il convient donc de retenir, non seulement la valeur des biens, objet de la transmission soumise à la formalité, mais également celle des biens préalablement donnés par le même donateur ou le même défunt au même héritier, donataire ou légataire. Bien entendu, doit être prise en compte la valeur totale des biens ainsi transmis et non la seule fraction ayant été précédemment taxée.

210

Toutefois, les donations passées depuis plus de quinze ans ne sont pas prises en compte pour la détermination du seuil précité.

Dès lors, le seuil prévu à l'article 793 bis du CGI sera déterminé en fonction de toutes les donations antérieures de biens ruraux loués par bail à long terme (ou par bail cessible hors du cadre familial), à l'exception de celles passées depuis plus de quinze ans au jour de la nouvelle mutation à titre gratuit de ces mêmes biens.

Bien entendu, pour l'appréciation de ce seuil, seuls seront pris en compte les biens qui auront effectivement bénéficié du régime de faveur dans le cadre de ces donations antérieures.

3. Obligations des parties

220

En complément des renseignements qui doivent être portés dans les actes de mutation à titre gratuit en application des dispositions de l'article 784 du CGI, les parties doivent indiquer dans tout acte de donation comprenant des biens mentionnés au 3° du 2 de l'article 793 du CGI si de tels biens ont fait l'objet de donations antérieures consenties entre les mêmes parties.

Dans toute déclaration se rapportant à une succession comprenant des biens mentionnés au même article, les héritiers ou légataires indiquent, dans le cadre de l'affirmation de sincérité, si de tels biens ont fait l'objet de donations antérieures à leur profit de la part du défunt.

230

Les actes de donation et les déclarations de succession doivent donc comporter le rappel :

- de l'ensemble des donations antérieures intervenues entre le donateur ou le défunt au profit de chaque donataire, héritier ou légataire, et leur montant ( BOI-ENR-DMTG-10-50-50) ;

- en individualisant celles comprenant des biens mentionnés au 3° du 2 de l'article 793 du CGI transmis par le donateur ou le défunt au même bénéficiaire ;

- ainsi que l'identité de chacun des bénéficiaires, le nom et la résidence des officiers ministériels qui ont reçu les actes de donation et leur date d'enregistrement.

4. Incidence de la limitation de l'exonération à l'égard de certaines règles

a. Imputation du passif contracté pour l'achat des biens exonérés

240

Pour la liquidation et le paiement des droits de mutation par décès, les dettes à la charge du défunt sont déduites de l'actif héréditaire, lorsque leur existence au jour de l'ouverture de la succession est dûment justifiée, par tous modes de preuve compatibles avec la procédure écrite (CGI, art. 768); se reporter au BOI-ENR-DMTG-10-40-20-10).

250

Ce principe souffre des exceptions.

Ainsi, les dettes énumérées à l'article 773 du CGI ne sont pas déductibles. Il s'agit de dettes qui sont présumées soit remboursées, soit fictives (BOI-ENR-DMTG-10-40-20-20).

En outre, les dettes visées à l'article 769 du CGI sont soumises à imputation spéciale (BOI-ENR-DMTG-10-40-20-40). Ainsi, aux termes de cet article, les dettes à la charge du défunt, qui ont été contractées pour l'achat de biens compris dans la succession et exonérés de droits de mutation par décès, ou dans l'intérêt de tels biens, sont imputées par priorité sur la valeur desdits biens. Cette règle a pour but d'éviter le cumul abusif, pour le même bien, de l'exonération de droits de mutation et de la déduction du passif contracté pour son achat, de la valeur des autres éléments de l'actif successoral. Dans la mesure où l'exonération des trois quarts afférente aux biens mentionnés au 3° du 2 de l'article 793 du CGI est ramenée à 50 % lorsque la valeur totale des biens transmis excède le seuil visé à l'article 793 bis du CGI, la déduction du passif grevant ces biens reste soumise aux dispositions de l'article 769 du CGI dans les mêmes proportions.

260

Exemple :

Succession de M. X... décédé à Paris le 12 mars 2011. Le défunt, qui est veuf, laisse pour lui succéder un fils unique. Pas de donation antérieure.

À l'actif successoral figure un bien rural loué à un tiers par bail à long terme d'une valeur de 160 000 €.

Au passif figure le solde justifié de l'emprunt souscrit pour l'acquisition du bien considéré d'un montant de 20 000 €.

La détermination de la fraction du passif déductible s'effectue de la façon suivante :

Actif imposable :

Partie des 160 000 € inférieure à 101 897 €

Exonérée : 76 423 € (¾)

Imposable : 25 474 € (1/4)

Partie des 160 000 € supérieure à 101 897 € (58 103 €)

Exonérée : 29 051,50 € (1/2)

Imposable : 29 051,50 € (1/2)

Total imposable : 54 525,50 € ( 25 747 + 29 051,50)

Passif déductible :

Le passif de 20 000 € à la charge de l'héritier est déductible de sa part taxable dans les conditions de droit commun, à concurrence de :

20 000 € x 54 525,50 € / 160 000 € = 6 816 €.

b. Forfait mobilier

270

À défaut de vente publique ou d'inventaire répondant aux conditions prévues au I de l'article 764 du CGI, la valeur imposable des meubles meublants est déterminée par la déclaration détaillée et estimative des parties qui ne peut être inférieure à 5 % de la valeur des autres biens de la succession.

Le forfait se calcule sur l'ensemble des valeurs mobilières, autres que les meubles meublants, et immobilières composant l'actif héréditaire et avant déduction du passif.

En revanche, il n'est pas tenu compte, pour la détermination du forfait, des biens exonérés de droits soit totalement, soit en cas d'exonération partielle, à concurrence de la partie exonérée (BOI-ENR-DMTG-10-40-10-20).

Dans la mesure où les biens mentionnés au 3° du 2 de l'article 793 du CGI continuent à être exonérés partiellement, seule la fraction taxable de ces biens doit être prise en compte pour le calcul du forfait mobilier.

III. Déchéance du régime de faveur des biens ruraux donnés à bail à long terme

280

Le maintien de l'exonération partielle prévue au 3° du 2 de l'article 793 du CGI en faveur des transmissions à titre gratuit de biens ruraux loués par bail à long terme est subordonné à la condition que les biens reçus restent la propriété du donataire, héritier ou légataire pendant une durée minimale de cinq ans à compter de la date de la transmission à titre gratuit (CGI, art. 793 bis ; cf. I-B § 100).

A. Principe de la déchéance du régime de faveur des biens ruraux donnés à bail à long terme

290

La déchéance du régime de faveur doit être prononcée lorsque le bien reçu sort du patrimoine du ou des bénéficiaires.

Une telle situation peut se présenter en cas de vente ou de donation de tout ou partie du bien reçu, que la mutation porte sur l'usufruit, la nue-propriété ou la pleine propriété du bien considéré.

300

L'exonération partielle est également remise en cause si, dans le délai de cinq ans, l'héritier ou le donataire fait apport de ces biens à un groupement foncier agricole même s'il conserve les parts pendant cinq ans.

En effet, cet apport met fin à la conservation personnelle des biens reçus pendant cinq ans à laquelle le premier alinéa de l'article 793 bis du CGI subordonne le bénéfice du régime de faveur, dès lors que le groupement a une personnalité distincte de celle de ses membres.

310

Lorsque l'obligation de conservation n'a pas été respectée pour une fraction seulement du bien, la remise en cause de l'exonération partielle s'applique néanmoins à l'ensemble du bien reçu par le ou les bénéficiaires.

Cependant, lorsque le bien a été lui-même partagé, la remise en cause de l'exonération partielle ne porte que sur la fraction du bien attribuée au copartageant qui n'a pas respecté le délai de conservation de cinq ans à compter du décès du de cujus, pour avoir donné ou cédé tout ou partie de la fraction du bien reçu.

Le respect de la condition de conservation du bien s'apprécie distinctement pour chaque mutation ayant bénéficié du régime de faveur. Ainsi, en cas de pluralité de biens de même nature ayant bénéficié de l'exonération partielle, la déchéance encourue sur l'un des biens est sans incidence à l'égard des autres biens.

B. Exceptions à la déchéance du régime de faveur des biens ruraux donnés à bail à long terme

320

L'exonération partielle n'est pas remise en cause en cas :

- de transmission à titre gratuit résultant du décès du bénéficiaire intervenant dans les cinq ans de la mutation à titre gratuit initiale (cf. déclaration du Ministre délégué, chargé du budget, débats Sén. JO du 19 décembre 1989 p. 5237) ;

- de force majeure, c'est-à-dire, d'après la Cour de Cassation, d'un événement imprévisible, insurmontable et totalement étranger au bénéficiaire de la transmission, à la condition qu'il y ait un lien de causalité directe avec le non-respect de la conservation du bien ;

- d'échange à condition que le respect de la conservation du bien cédé soit reporté sur les biens ruraux reçus en contre échange et que les biens reçus soient d'une valeur au moins égale à celle des biens cédés ;

- d'apport en jouissance à une société civile agricole quelle que soit sa forme, ou d'un apport pur et simple à un GAEC ;

- d'expropriation pour cause d'utilité publique.

A cet égard, il est admis que l'exonération partielle de droits de mutation applicable à la transmission à titre gratuit des biens ruraux loués par bail à long terme, prévu au 3° du 2 de l'article 793 du CGI et à l'article  793 bis du CGI, ne soit pas remise en cause lorsque le non-respect du délai de détention des biens reçus par les donataires, héritiers ou légataires pendant cinq ans, est le fait de la puissance publique, dans un but d'utilité publique. Cette solution s'applique sans qu'il y ait à distinguer selon que le transfert de propriété des biens compris dans la déclaration d'utilité publique ou l'arrêté de cessibilité a fait l'objet d'un acte amiable ou d'une ordonnance du juge de l'expropriation. Cette mesure de tempérament ne saurait être étendue à toutes les acquisitions immobilières effectuées à l'amiable et à titre onéreux par les collectivités territoriales et les organismes mentionnés au I de l'article 1042 du CGI, dès lors qu'il peut s'agir de cessions volontaires du cédant, qui ne sont pas nécessairement justifiées par un intérêt public ou un cas de force majeure (RM Herment n°6285, JO Sénat du 4 août 1994, p. 1931).

1. Apport en jouissance à un GFA

330

En principe, l'exonération partielle est remise en cause si, dans un délai de cinq ans, l'héritier ou le donataire fait apport de ses biens à un GFA, même s'il conserve les parts pendant cinq ans. Toutefois, il est admis que la location, la mise à disposition et l'apport en jouissance à un GFA n'entraînent pas la remise en cause de l'exonération partielle dont a bénéficié la mutation à titre gratuit.

2. Activités commerciales annexes exercées par le preneur

340

Lorsque le preneur à bail rural à long terme exerce des activités commerciales annexes, il est admis que le régime de faveur résultant du 3° du 2 de l'article 793 du CGI ne soit pas remis en cause dans la mesure où ces activités commerciales sont compatibles avec l'application du statut du fermage.

3. Absence de publication du bail à long terme

350

L'absence de publication par le donateur ou le défunt d'un bail rural à long terme n'est pas de nature, à elle seule, à priver le donataire ou l'héritier du bénéfice des dispositions du 3° du 2 de l'article 793 du CGI.

C. Conséquences fiscales de la déchéance du régime de faveur

1. Droits complémentaires et pénalités exigibles

360

Le non-respect du délai de conservation des biens reçus pendant cinq ans à compter de la transmission à titre gratuit par le donataire, l'héritier ou légataire entraîne l'exigibilité du complément de droits de mutation à titre gratuit, dont la mutation initiale a été exonérée, majoré de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du CGI.

2. Redevable des droits

370

Le complément de droits de mutation et l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du CGI doivent être supportés par les ayants droit qui ont bénéficié de l'exonération partielle lors de la liquidation initiale des droits de mutation à titre gratuit.

En conséquence, sont redevables du complément de droits de mutation et de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du CGI le ou les ayants droit qui étaient déjà redevables de l'impôt lors de cette liquidation initiale des droits.

3. Recouvrement des droits et pénalités rappelés

380

Les droits rappelés et l'intérêt de retard légalement exigibles devront être acquittés à la première réquisition de l'administration. Celle-ci devra être précédée, dans tous les cas, de la mise en œuvre de la procédure de redressement contradictoire.