REC - Évènements affectant l'action en recouvrement - Prescription de l'action en recouvrement - Modification du délai de prescription
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Avant que ne s'accomplisse le délai quadriennal de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales (LPF), qui a pour effet de frapper de prescription le droit d'agir de l'administration, individualisé créance par créance dans les écritures du comptable public, des événements intercalaires ont pu modifier le cours du délai de prescription, de deux manières différentes.
Ces évènements vont entraîner soit l'interruption, soit la suspension de la prescription. L'interruption de la prescription enlève toute valeur au délai déjà écoulé et fait courir un nouveau délai de même nature et de même durée. L'acte interruptif de prescription a pour effet de substituer à la prescription en cours une nouvelle prescription de même durée. La fin de l'interruption marque donc le point de départ d'un nouveau délai de même nature que le précédent.
La suspension de la prescription entraîne quant à elle l'arrêt du cours de la prescription tant que le créancier se trouve dans l'impossibilité d'agir. Le délai déjà écoulé est maintenu et recommence à courir à la date à laquelle la cause de la suspension a disparu.
I. L'interruption de la prescription de l’action en recouvrement
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Quatre causes d’interruption sont propres à la prescription extinctive : la reconnaissance du droit par le débiteur (code civil [C. civ.], art. 2240), la demande en justice (C. civ., art. 2241), la mesure conservatoire ainsi que l’acte d’exécution forcée (C. civ., art. 2244).
Les effets et la portée de l'interruption de prescription sont caractérisés clairement par les dispositions intégrées au C. civ., à savoir l'article 2242 du C. civ. selon lequel « l’interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu’à l’extinction de l’instance » tandis que l'article 2243 du C. civ. prévoit que « l’interruption est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l’instance, ou si sa demande est définitivement rejetée ».
Enfin, aux termes de l'article 2245 du C. civ., l'interpellation faite à l'un des débiteurs solidaires par une demande en justice ou par un acte d'exécution forcée ou la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription contre tous les autres, même contre leurs héritiers.
A. Les événements susceptibles d'interrompre la prescription
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L'article L. 274 du LPF ne fait plus expressément référence aux modalités d’interruption du délai de prescription, mais il y a lieu de considérer que le délai de prescription de l’action en recouvrement fiscale est interrompu dans les conditions de droit commun (avis du CE, section des finances, 30 avril 1996, n° 359858).
1. Les actes interruptifs
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Conformément à l'article 2244 du C. civ., le délai de prescription ou le délai de forclusion est également interrompu par une mesure conservatoire prise en application du code des procédures civiles d'exécution (CPC exéc.) ou un acte d'exécution forcée.
a. La mise en demeure de payer
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La mise en demeure de payer, visée à l’article L. 257-0 A du LPF, prévoit qu'à défaut de paiement de l'acompte mentionné à l'article 1663 C du code général des impôts (CGI) ou des sommes mentionnées sur l’avis d’imposition à la date limite de paiement ou de celles mentionnées sur l’avis de mise en recouvrement (AMR), le comptable public compétent adresse au contribuable une mise en demeure de payer. La mise en demeure de payer interrompt la prescription de l’action en recouvrement. Elle peut être contestée dans les conditions prévues à l’article L. 281 du LPF.
b. L'accomplissement d’actes d’exécution forcée
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Conformément à l'article 2244 du C. civ., les actes d'exécution forcée interrompent la prescription.
Remarque : Les saisies effectuées entre les mains d’un tiers sont caduques si elles ne sont pas dénoncées au débiteur et dans ce cas, elles ne sont pas interruptives de prescription.
1° Les procédures de saisie mobilière
a° La saisie-vente
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Chaque acte de la procédure de saisie-vente (procès-verbal de saisie, de vérification des objets saisis et de vente) est interruptif de prescription (BOI-REC-FORCE-20).
Il convient de retenir, comme point de départ du nouveau délai de quatre ans, la date d’établissement de l’acte par l’huissier.
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Lorsqu’il n’y a aucun bien saisissable, l’huissier dresse un procès-verbal de carence conformément à l’article R. 221-14 du CPC exéc.. Cet acte n’est pas à proprement parler un acte d’exécution car il rend compte de la tentative d’une mesure impossible. Il est néanmoins interruptif de prescription dès lors qu’il marque la volonté du Trésor de poursuivre le recouvrement de sa créance.
Un arrêt a admis le caractère interruptif de prescription d’un procès-verbal de carence (CAA Marseille, décision du 3 septembre 2009, n° 07MA00110).
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Le procès verbal de recherche est établi par l’huissier qui se trouve dans l’impossibilité de dresser un procès-verbal du fait de la disparition du débiteur. Il est interruptif de prescription s’il donne lieu à l’accomplissement des formalités prévues à l’article 659 du code de procédure civile (CPC).
Le procès-verbal doit notamment et précisément mentionner les diligences accomplies par l’huissier de justice pour rechercher le destinataire de l’acte (Cass. civ., décision du 7 décembre 2006, n° 06-11211). En revanche, le simple relevé de recherches infructueuses prévu à l’article L. 152-2 du CPC exéc. n’est pas interruptif de prescription. Les diligences mentionnées au procès-verbal doivent être suffisantes à l'appréciation souveraine des juges du fond, Cass. civ., décision du 20 mars 2003, n° 01-11542).
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Lorsqu’un incident relatif à la saisissabilité des biens survient, le redevable peut présenter ses observations à l’huissier qui doit alors dresser un procès-verbal de difficultés. Les demandes relatives à la propriété ne font pas obstacle à la saisie, mais suspendent la procédure pour les biens saisis qui en font l’objet. Ces contestations relèvent de l’opposition à poursuite. La prescription est interrompue par le procès-verbal de difficultés car la saisie a, malgré tout, été effectuée.
b° La saisie-attribution
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L’acte de la saisie-attribution régulièrement signifié au tiers par l’huissier interrompt la prescription (BOI-REC-FORCE-20-10).
c° La saisie des rémunérations
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La requête aux fins de conciliation (code du travail [C. trav.], art. R. 3252-13) est interruptive de prescription.
Si, à l’audience de conciliation, le débiteur prend des engagements de paiement acceptés par le créancier, cet événement constitue une reconnaissance de dette interruptive de prescription.
d° Les mesures d’exécution sur les véhicules terrestres à moteur
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L’acte interruptif est constitué par la signification au débiteur de la déclaration valant saisie qui a été signifiée à la préfecture conformément à l’article R. 223-3 du CPC exéc..
C’est la notification au débiteur qui produit tous les effets d’une saisie (CPC exéc., art. L. 223-1).
Pour la saisie par immobilisation dans le cadre d’une saisie-vente (CPC exéc., art. R. 223-7), les règles définies en matière de saisie-vente s’appliquent : les effets sur la prescription sont les mêmes que ceux attachés à la saisie-vente.
L’acte interruptif est le procès-verbal d’immobilisation du véhicule, prévu à l’article R. 223-8 du CPC exéc., s'agissant des autres saisies par immobilisation pour obtenir une somme d’argent.
e° La saisie des droits incorporels
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L'acte de saisie auprès de la personne morale émettrice est interruptif de prescription (CPC exéc., art. L. 231-1, CPC exéc., art. L. 233-1 et CPC exéc., art. R. 232-1 à CPC exéc., art. R. 233-9).
2° La saisie immobilière
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Aux termes de l’article R. 321-1 du CPC exéc., la procédure d’exécution est engagée par la signification du commandement de payer valant saisie.
Dans ces conditions, la notification du commandement interrompt la prescription sous réserve de sa publication au service de la publicité foncière dans le délai maximum de deux mois (CPC exéc., art. R. 321-6) et d’une adjudication intervenant dans les deux ans de sa publication (CPC exéc., art. R. 321-20), sauf s’il y a eu un jugement prorogeant le délai, par application de l'article R. 321-22 du CPC exéc. (BOI-REC-FORCE-40).
(110)
120
Par ailleurs, la demande en justice interrompt le délai de prescription (C. civ., art. 2241). L’interruption produit ses effets jusqu’à l’extinction de l’instance (C. civ., art. 2242) sauf en cas de rejet définitif de la demande par le juge. Au cas particulier, la saisine du juge de l’exécution par le créancier dans les deux mois de la publication du commandement interrompt également la prescription jusqu’à un éventuel jugement d’adjudication.
3° La saisie administrative à tiers détenteur
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La saisie administrative à tiers détenteur (SATD) interrompt la prescription de l'action en recouvrement qui court à l'encontre du comptable public, pour les sommes dont le paiement est réclamé au tiers.
Un avis à tiers détenteur (ancienne appellation de la SATD jusqu'au 31 décembre 2018) n’est interruptif de prescription que s’il a été régulièrement notifié au tiers détenteur et au débiteur (CE, décision du 16 mai 2008, n° 290105).
Un avis à tiers détenteur portant sur un compte débiteur a un effet interruptif (CAA Lyon, décision du 20 juin 1996, n° 93LY00985).
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En revanche, la SATD n’a pas d’effet interruptif lorsque, au jour de la notification, le tiers détenteur n’est pas en relation d’affaires avec le débiteur (ex : compte bancaire clôturé).
4° Les mesures conservatoires
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L’article 2244 du C. civ., qui regroupe les règles relatives à l’interruption de la prescription en matière de procédure d’exécution et de mesures conservatoires, dispose que le délai de prescription ou le délai de forclusion est également interrompu par une mesure conservatoire prise en application du CPC exéc..
En outre, le régime de l’interruption pour les mesures conservatoires est calqué sur celui des procédures d’exécution, qui sont interruptives dès leur accomplissement.
Toutefois, la mesure conservatoire ne peut être interruptive que si elle est ultérieurement et régulièrement notifiée au débiteur.
2. La citation en justice
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Toute demande en justice qui tend à faire reconnaître ou à exercer un droit produit un effet interruptif qui se prolonge jusqu’à ce que le litige trouve sa solution définitive.
L'article 2241 du C. civ. dispose que « la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. Il en est de même lorsqu’elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l’acte de saisine de la juridiction est annulé par l’effet d’un vice de procédure ».
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Sont notamment interruptives de prescription :
- l’action paulienne et l’action en simulation (BOI-REC-SOLID-30-10 et BOI-REC-SOLID-30-20) ;
- l’assignation en vente globale de fonds de commerce, quelle que soit la procédure choisie (BOI-REC-FORCE-50-10-20) ;
- la déclaration de créances dans une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire (BOI-REC-EVTS-10-30).
180
En revanche, un litige engagé à l’initiative du redevable (contestation d’assiette) est sans incidence sur le cours de la prescription, sauf si une demande de sursis de paiement a été déposée dans le cadre de la contestation de l’assiette.
De même les contestations visant des poursuites sont sans incidence sur le cours de la prescription (opposition à poursuites) à l’exception des revendications d’objets saisis.
190
S’agissant des actions engagées contre un dirigeant sur le fondement de l’article L. 267 du LPF ou de l'article 1745 du CGI, les actes de la procédure judiciaire intervenus avant que la solidarité ne soit établie par une décision juridictionnelle, qui ne visent que la personne poursuivie (pas encore débitrice), ne peuvent en aucun cas avoir un effet interruptif sur la prescription des impositions dues par le redevable légal (BOI-REC-SOLID-10-10 et BOI-REC-SOLID-10-20).
3. La reconnaissance de dette par les redevables
200
L'article 2240 du C. civ. précise que « la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription ».
Ces dispositions de droit commun sont applicables en matière fiscale. Il n’existe pas de définition légale de la reconnaissance de dette. C’est donc la jurisprudence qui permet de cerner les contours de la notion.
210
Pour opérer son effet interruptif, elle doit émaner du débiteur lui-même ou de son mandataire. Elle peut être expresse ou tacite.
Expresse, elle peut être donnée sous une forme quelconque et spécialement dans une correspondance adressée au service ou dans des mémoires ou conclusions.
Quand elle est tacite, elle résulte de tout acte du débiteur impliquant sans équivoque son aveu de la créance de l’administration.
220
La reconnaissance, même partielle, que le débiteur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait entraîne, pour la totalité de la créance, un effet interruptif qui ne peut se fractionner (Cass. civ., décision du 16 novembre 2006, n° 05-18287).
230
La prescription est ainsi valablement interrompue par le versement d’un acompte (CE, 10 août 2005, n° 259741 et CE, 6 juin 2007, n° 282629) ou par une demande de délai de paiement.
La prescription se trouve interrompue successivement par la demande de délai du redevable et par chacun des versements partiels effectués en fonction du plan de règlement (CE, 30 juin 2000, n° 177930).
Les effets sur la prescription jouent également dans le cas où un plan de règlement est conclu après l’expiration du sursis de paiement (instance toujours pendante devant la cour administrative d’appel ou la cour d’appel selon les impôts contestés) : la conclusion du plan est interruptive, la prescription étant alors suspendue tant que le plan est respecté (CE, 30 juin 2000, n° 177930).
240
Ont également un effet interruptif, une demande en remise gracieuse, l'engagement de payer les droits et pénalités.
L'envoi d’un avis de compensation par le comptable a un effet interruptif de prescription, dès lors qu’il manifeste la volonté de celui-ci d’exercer son droit et corrélativement, chez le débiteur qui ne la conteste pas, la reconnaissance du droit du comptable.
250
Cela étant, le Conseil d'État a rappelé les éléments caractérisant la reconnaissance de dette (CE, 7 septembre 2009, n° 316523) : « la reconnaissance de dette interruptive de la prescription ne peut résulter que d’un acte ou d’une démarche par lequel le redevable se réfère clairement à une créance définie par sa nature, son montant et l’identité du créancier ».
Cette formulation a été reprise dans une décision du Conseil d'État du 23 juillet 2010, n° 311857.
Remarque : Si le redevable effectue un paiement sans en préciser l’affectation, et en cas de pluralité de dettes, ledit paiement doit être affecté en respectant l’ordre d’imputation prévu par l’article 1342-10 du C. civ..
4. La compensation
260
L’article L. 257 B du LPF dispose que le comptable public compétent peut affecter au paiement des impôts, droits, taxes, pénalités ou intérêts de retard dus par un redevable, les remboursements, dégrèvements ou restitutions d’impôts, droits, taxes, pénalités ou intérêts de retard constatés au bénéfice de celui-ci.
La compensation réalise le paiement de deux dettes réciproques à concurrence de la plus faible.
De même que le paiement partiel de sa dette par un débiteur opère une reconnaissance de la totalité de celle-ci, la compensation interrompt la prescription courant à l’encontre du créancier détenant la créance la plus élevée, pour la partie de sa créance qui n’a pas été compensée.
270
Pour que la compensation comporte un effet interruptif, il ne suffit pas que les conditions la faisant opérer soient réunies. Il faut par ailleurs qu’elle ait été invoquée.
L’article R. 257 B-1 du LPF énonce que lorsqu’il exerce la compensation prévue à l’article L. 257 B du LPF, le comptable public notifie au redevable un avis lui précisant la nature et le montant des sommes affectées au paiement de la créance.
280
Conformément à la jurisprudence administrative, le redevable peut contester cette compensation dans les deux mois de la réception de cet avis suivant la procédure des oppositions aux actes de poursuites (LPF, art. L. 281, LPF, art. R*. 281-1, LPF, art. R*. 281-3-1, LPF, art. R*. 281-4 et LPF, art. R*. 281-5).
En effet, selon les juridictions administratives, si la compensation n’est pas juridiquement un acte de poursuite, ses effets sont analogues à ceux d’une double saisie réciproque de deniers et comme telle, contestable suivant la procédure spéciale des oppositions.
L’avis de compensation est adressé au redevable par courrier recommandé avec accusé de réception.
L’envoi de cet avis a un effet interruptif de prescription, dès lors qu’il manifeste la volonté du comptable d’exercer son droit et corrélativement, chez le débiteur qui ne la conteste pas, la reconnaissance du droit du comptable (BOI-REC-PREA-10-30).
B. Actes non interruptifs de prescription
290
Ne constitue pas une cause d’interruption de prescription la prise de garanties (nantissements, hypothèques), en dehors du cas particulier des sûretés judiciaires prises dans le cadre des mesures conservatoires (CPC exéc., art. L. 511-1).
300
De même, l’opposition à versement du prix de vente d’un fonds de commerce n’est pas un acte interruptif de prescription.
La Cour de cassation a en effet jugé que l’opposition n’étant qu’un acte conservatoire ayant pour seul effet de rendre indisponible le prix de vente et de permettre au créancier de faire valoir postérieurement ses droits dans une distribution de prix, elle ne peut être assimilée à une saisie et interrompre la prescription (Cass. com., décision du 16 juin 1998, n° 96-14170 et Cass. civ., décision du 16 décembre 2010, n° 09-70735).
II. La suspension de la prescription de l’action en recouvrement
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En vertu de l'article 2230 du C. civ., la suspension de la prescription en arrête temporairement le cours sans effacer le délai déjà couru.
Selon l’article 2234 du C. civ., la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l’impossibilité d’agir par suite d’un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure.
Les causes de suspension de la prescription sont le sursis de paiement et la survenance d'une procédure empêchant le créancier d'agir.
A. Les cas de suspension
1. Le sursis de paiement
310
Le sursis de paiement est présenté au BOI-REC-PREA-20-20.
320
Le sursis est un droit qui doit être revendiqué. Le sursis n’est pas lié à la constitution de garantie, qu’elle soit spontanée ou sur demande du comptable. Ainsi, un redevable qui refuse expressément de fournir des garanties bénéficie néanmoins du sursis de paiement s’il l’a demandé et si la réclamation est recevable.
330
Selon l’article L. 277 du LPF relatif au sursis de paiement, le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge est autorisé, s’il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes.
Lorsque la réclamation mentionnée au premier alinéa de l'article L. 277 du LPF porte sur un montant de droits supérieur à celui fixé par décret, le débiteur doit constituer des garanties portant sur le montant des droits contestés (à l’exclusion de toute pénalité).
À défaut de constitution de garanties ou si les garanties offertes sont estimées insuffisantes, le comptable peut prendre des mesures conservatoires pour les impôts contestés.
L’article R. 277-7 du LPF précise qu'en cas de réclamation relative à l'assiette d'imposition, et portant sur un montant de droit supérieur à 4 500€, le débiteur doit constituer des garanties portant sur le montant des droits contestés.
340
La prise de garanties se limite au seul montant des droits contestés, à l’exclusion de toute pénalité. En l’absence de constitution de garantie, le comptable peut diligenter des mesures conservatoires.
Les mesures conservatoires susceptibles d’être prises par les comptables sont celles visées à l'article L. 511-1 du CPC exéc., à l'article L. 511-2 du CPC exéc., à l'article L. 511-3 du CPC exéc. ainsi que de l'article R. 511-1 du CPC exéc. à l'article R. 511-8 du CPC exéc.. La prise de mesures conservatoires a un effet interruptif de prescription (I-A-1-b-4° § 150).
L’exigibilité de la créance et la prescription de l’action en recouvrement sont suspendues jusqu’à ce qu’une décision définitive ait été prise sur la réclamation soit par l’administration, soit par le tribunal compétent.
Le sursis de paiement cesse d’avoir effet :
- à l’expiration du délai de deux mois qui court à partir du jour de la réception de la décision expresse du rejet de la réclamation, lorsqu’il n’y a pas de recours devant le tribunal. Le défaut de décision dans le délai de six mois prévu par l’article R*. 198-10 du LPF ne peut être assimilé à un rejet de la réclamation bien qu’il ouvre au contribuable le droit de saisir le tribunal. L’expiration de ce délai ne met pas fin au sursis de paiement et donc à la suspension de la prescription.
La circonstance qu’une décision implicite de rejet serait née du silence de l’administration pendant six mois sur la réclamation d’assiette initiale n’a pas eu pour effet de rendre l’imposition litigieuse à nouveau exigible, et n’a eu dès lors non plus aucun effet sur la suspension du cours de la prescription (CAA Versailles, décision du 30 mai 2006 n° 04VE02437 et Cass. com., décision du 7 octobre 2008, n° 07-17902) ;
- en cas de recours devant le tribunal, à la notification du jugement de la juridiction saisie en première instance (CE, décision du 28 juin 1989, n° 61483).
L’effet suspensif ne s’applique plus aux recours ultérieurs devant les cours d’appel, le Conseil d'État ou la Cour de cassation.
Dans tous les cas, les actes de poursuites effectués avant la demande régulière de sursis conservent leur effet interruptif de prescription dans la mesure où ils ont été notifiés régulièrement avant ladite demande.
2. Le sursis à exécution des décisions juridictionnelles
a. Instances devant les juridictions administratives
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Le sursis de paiement prévu par les dispositions de l’article L. 277 du LPF n’a de portée que pendant la durée de l’instruction de la réclamation et de l’instance devant le tribunal administratif et ne peut donc être prolongé pendant la durée de l’instance devant la cour administrative d’appel.
Devant la cour, le redevable est autorisé à demander le sursis à exécution de la décision attaquée.
Ainsi, aux termes de l’article R. 811-17 du code de justice administrative (CJA), le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d’entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l’état de l’instruction.
Le sursis à exécution est une cause de suspension de la prescription puisqu’il interdit au comptable de poursuivre le recouvrement. Toutefois, il ne produit ses effets que lorsqu’il est accordé (CE, 8ème et 3ème s.-s., décision du 30 novembre 2001, n° 234654).
Le sursis à exécution (et l’effet suspensif) prend fin lorsque la juridiction statue au fond sur le recours en annulation.
Remarque : Devant le Conseil d’État, le sursis à exécution est régi par l'article R. 821-5 du C JA et l'article R. 821-5-1 du CJA. Les principes susvisés sont transposables à la procédure devant le Conseil d’État.
b. Procédure devant le tribunal judiciaire (concerne notamment les droits d’enregistrement)
360
Le sursis de paiement n’a de portée que pendant la durée de l’instruction de la réclamation et de l’instance devant le tribunal judiciaire.
L'exécution provisoire peut être aménagée dans les conditions prévues de l'article 514 du CPC à l'article 524 du CPC.
Dans les cas où l’arrêt (ou l’aménagement) de l’exécution provisoire a pour effet d’interdire au comptable de poursuivre le recouvrement de sa créance, la prescription de l’action en recouvrement est suspendue.
3. Les procédures empêchant les créanciers d'agir
a. La procédure de rétablissement personnel
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La procédure est définie par le code de la consommation (C. consom., art. L. 724-1 et suiv.) [BOI-REC-EVTS-10-10-20].
1° Les principes
370
Cette procédure permet d’effacer toutes les dettes non professionnelles d’une personne physique par la vente de son patrimoine, même si le produit de la vente ne permet pas de rembourser l’intégralité des dettes.
Le surendettement est caractérisé par l’impossibilité manifeste pour un particulier de faire face à l’ensemble de ses dettes ainsi qu’à ses engagements en tant que caution.
Les dettes fiscales sont incluses dans ce dispositif (impôt sur le revenu établi pour tout ou partie à partir de revenus tirés de l’exercice de la profession, bénéfices industriels et commerciaux (BIC), bénéfices non commerciaux (BNC), taxe d’habitation, taxe foncière d’immeuble non affecté à la profession).
2° Les effets sur la prescription
380
Une commission de surendettement des particuliers est instituée dans chaque département. Elle est saisie par le débiteur qui doit être de bonne foi. Elle a pour mission de concilier les parties en vue de l’élaboration d’un plan conventionnel de redressement.
Durant la préparation du plan, la commission peut demander au juge des contentieux de la protection de rendre une décision de suspension des poursuites (cette suspension, qui ne s’adresse qu’aux créanciers poursuivants visés dans la demande, ne peut excéder un an).
Un rééchelonnement du paiement des dettes (y compris fiscales) peut être accordé avec un délai total de dix ans. Les dettes fiscales font l’objet d’un rééchelonnement dans les mêmes conditions que les autres dettes.
390
Par ailleurs, en cas de doute sur la solvabilité du débiteur, la commission peut imposer la suspension de l’exigibilité des créances pour une durée qui ne peut excéder deux ans (dans le cadre d’une période d’observation avec application des mesures préconisées par la commission).
La prescription de l’action en recouvrement ne peut dès lors être opposée au comptable qui est empêché d’agir.
400
A l’issue de cette période de deux ans, la commission procède à un nouvel examen de la situation du débiteur qui peut donner lieu à un effacement partiel des dettes et à un plan d’apurement qui ne peut dépasser dix ans.
Lorsque la situation du débiteur est irrémédiablement compromise, le juge des contentieux de la protection prononce l’ouverture de la procédure de rétablissement personnel.
Les créanciers sont avertis par des mesures de publicité du jugement d’ouverture d’avoir à déclarer leurs créances. Le jugement rendu entraîne la suspension des procédures d’exécution jusqu’au jugement de clôture.
La prescription de l’action en recouvrement ne peut être opposée aux comptables puisqu’ils sont empêchés d’agir.
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La clôture pour insuffisance d’actif entraînant l’effacement des dettes non professionnelles, les créances non apurées font normalement l’objet d’une remise.
Remarque : En application de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, les situations de surendettement des particuliers et la procédure de rétablissement personnel relèvent désormais de la compétence du juge des contentieux de la protection (Code de l'organisation judiciaire, art. L. 213-4-7).
b. L'ouverture de procédures concernant les entreprises en difficulté
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L’objectif de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises est d’anticiper le traitement des difficultés des entreprises afin de les sauvegarder et de maintenir l’emploi.
Quatre procédures sont prévues : la conciliation (BOI-REC-EVTS-10-10-10), la sauvegarde (BOI-REC-EVTS-10-20-10), le redressement judiciaire (BOI-REC-EVTS-10-20-20) et la liquidation judiciaire (BOI-REC-EVTS-10-20-30-10).
1° La procédure de conciliation
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La conciliation (qui n’est pas une procédure collective) est ouverte à toute entreprise qui éprouve une difficulté juridique, économique ou financière avérée ou prévisible et qui ne se trouve pas en état de cessation des paiements depuis plus de quarante cinq jours.
a° Les créances nées antérieurement au jugement d’homologation
440
En phase de recherche de l’accord, le tribunal qui a ouvert la conciliation peut, sur demande du débiteur, imposer au comptable des délais de paiement prévus par l'article 1343-5 du C. civ. pour une durée maximale de deux ans.
Dans ce cadre, les procédures d’exécution et, par voie de conséquence, la prescription de l’action en recouvrement sont suspendues, le comptable étant dans l’impossibilité d’agir.
Aux termes de l’article L. 611-10-1 du code de commerce (C. com.), l’accord constaté ou homologué interrompt ou interdit toute action en justice et arrête ou interdit toute poursuite individuelle tant sur les meubles que les immeubles du débiteur dans le but d’obtenir le paiement des créances qui en font l’objet. Ainsi, l’exécution de l’accord suspend jusqu’à son terme ou sa résolution la prescription de l’action en recouvrement (pour ce qui concerne les créances visées par l’accord). Par ailleurs, le jugement d’homologation ou la conclusion de l’accord signé du débiteur (valant reconnaissance de dette) interrompt la prescription.
b° Les créances nées postérieurement au jugement d’homologation
450
La suspension des poursuites et donc la suspension de la prescription de l’action en recouvrement ne concernent pas les créances nées postérieurement au jugement d’homologation.
2° Les procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire
a° Les créances soumises à déclaration (créances antérieures au jugement déclaratif)
460
Les procédures de sauvegarde, de redressement et de liquidation judiciaires sont à l'origine de causes d’interruption et de suspension se succédant entre elles.
Conformément à l'article L. 622-25-1 du C. com., la déclaration de créance interrompt la prescription jusqu'à la clôture de la procédure. Elle dispense de toute mise en demeure et vaut acte de poursuites.
Ainsi, la prescription est interrompue par la déclaration de créances (BOI-REC-EVTS-10-30) [C. com., art. L. 622-24 ; C. com., art. L. 622-25 ; C. com., art. L. 622-25-1 ; C. com., art. L. 622-26 ; C. com., art. L. 631-14 et C. com., art. L. 641-3] et l’effet interruptif se prolonge jusqu’à la clôture de la procédure collective (Cass. Com., décision du 15 mars 2005, n° 03-17783 ; CE, décision du 27 octobre 2009, n° 300438).
Par ailleurs, la prescription est suspendue tant qu’aucune mesure de poursuite ne peut être exercée, le Trésor étant soumis, comme tout autre créancier, à la règle de la suspension des poursuites individuelles, conformément à l'article L. 622-21 du C. com., à l'article L. 631-14 du C. com. et à l'article L. 641-3 du C. com..
Ainsi, en pratique, la prescription ne court pas pendant toute la durée de la procédure et ne recommencera à courir qu’après la clôture de la procédure collective.
En cas de redressement judiciaire, pendant la durée du plan de redressement, les coobligés et les personnes ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie ne peuvent se prévaloir des dispositions du plan (C. com., art. L. 631-20), contrairement à la sauvegarde.
Dans ces conditions, le délai de prescription de l’action en recouvrement à l’encontre de ceux-ci continue à courir.
470
La liquidation judiciaire a pour objet de mettre fin à l’activité de l’entreprise ou de réaliser le patrimoine du débiteur par une cession totale ou séparée de ses droits et biens (C. com., art. L. 640-1, al. 2). Elle peut être prononcée au cours de la période d’observation d’une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire.
Pendant toute la durée de la procédure le comptable est soumis à la suspension des poursuites et le délai de prescription de la créance ne court pas.
480
Le deuxième alinéa de l’article L. 643-9 du C. com. prévoit que la procédure est clôturée pour extinction du passif ou, plus souvent, pour insuffisance d’actif. Par ailleurs, le jugement de clôture pour insuffisance d’actif de la liquidation judiciaire ne fait pas en principe recouvrer aux créanciers l’exercice individuel de leurs actions à l’encontre du débiteur (C. com., art. L. 643-11).
Ce texte prévoit toutefois, pour moraliser la vie économique, plusieurs exceptions à ce principe (condamnation pénale ou faillite personnelle du débiteur, banqueroute, récidive, fraude à l’égard des créanciers [C. com., art. L. 643-11]).
Lorsque la reprise des poursuites est fondée juridiquement et en opportunité, les comptables disposent d’un délai de quatre ans pour agir à compter du jugement de clôture.
b° Les cas particuliers
490
S'agissant de la solidarité au paiement de l’impôt sur le revenu entre époux et partenaires liés par un pacte civil de solidarité (PACS) (CGI, art. 1691 bis), l’effet interruptif de prescription opéré par une déclaration de créances au passif d’une procédure collective ouverte à l’encontre de l’un des époux s’étend à l’autre époux et cet effet se prolonge jusqu’à la clôture de ladite procédure (CE, décision du 27 octobre 2009, n° 300438).
Par ailleurs, la suspension des poursuites individuelles n’est pas applicable à l’époux qui n’a pas fait l’objet de la procédure.
Dès lors, le conjoint dont l’époux est soumis à une procédure collective, peut se voir opposer l’interruption de la prescription qui résulte de le déclaration de créances avec un effet qui se prolonge jusqu’à la clôture de ladite procédure. En revanche, il ne peut invoquer la suspension des poursuites dont bénéficie son conjoint et peut donc être poursuivi.
500
La Cour de cassation a jugé que, dans le cadre d’un régime de communauté, les salaires de l’époux in bonis ont la nature de biens communs. Ils sont saisis par l’effet de la procédure ouverte contre le conjoint. Dès lors, les créanciers de cet époux maître de ses biens subissent l’attraction de la procédure collective et la voie de la saisie des rémunérations leur est fermée (Cass. com., décision du 16 novembre 2010, n° 09-68459).
En revanche, les biens propres du conjoint in bonis, qui sont, par principe, exclus de la procédure collective, peuvent être saisis par les créanciers de celui-ci.
c° Les autres créances (nées postérieurement à l’ouverture de la procédure collective)
510
Les créances nées postérieurement au jugement d'ouverture et devant être payées à leur échéance ne sont pas soumises à déclaration (C. com., art. L. 622-17 et C. com., art. L. 641-13).
Les créances en cause n’étant pas soumises à l’arrêt des poursuites individuelles, le délai normal de prescription n’est pas modifié.
B. Les effets et la portée de la suspension
520
Le bénéfice de la suspension ne peut être invoqué que contre les personnes vis-à-vis desquelles la suspension est édictée (toutefois, pour les procédures collectives il convient de se reporter au II-A-3-b-2°-b° § 490 à 500 pour le cas particulier de la solidarité entre époux). Ainsi, le créancier qui bénéficie d’une suspension de prescription parce qu’il est privé du droit d’agir contre son débiteur principal ou l’un de ses codébiteurs, même solidaire, ne peut invoquer la suspension de la prescription à l’égard de la caution ou des autres codébiteurs dès lors qu’il dispose de son droit de poursuite individuelle à leur égard.
III. Les cas particuliers
A. Pluralité de débiteurs
530
Le bénéfice de la suspension ne peut être invoqué que contre les personnes vis-à-vis desquelles la suspension est édictée. Le créancier privé du droit d'agir contre le débiteur principal ou l'un des codébiteurs, même solidaire, ne peut invoquer la suspension à l'égard de la caution ou des autres codébiteurs dès lors qu'il dispose de son droit de poursuite individuelle à leur égard.
L’interruption de prescription ne peut, en principe, être opposée qu’à celui contre qui elle est dirigée. Ce principe subit toutefois des exceptions.
L’article 2245 du C. civ. prévoit que l’interpellation faite à l’un des débiteurs solidaires par une demande en justice ou par un acte d’exécution forcée ou la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription contre tous les autres, même contre leurs héritiers (voir également l'article 1312 du C. civ.).
L’interpellation faite au débiteur principal ou sa reconnaissance de dette interrompt le délai de prescription contre la caution (C. civ., art. 2246).
D’une manière générale, un acte interruptif fait à l’encontre du principal obligé a effet à l’égard de l’ensemble des coobligés.
L'AMR notifié à chacun des coobligés, conformément à l'article R*. 256-2 du LPF, lorsque le comptable poursuit le recouvrement à l'égard de débiteurs tenus conjointement ou solidairement ne constitue pas un acte de poursuite au sens des articles précités, il s'agit du titre exécutoire.
B. Sociétés civiles
540
L'obligation des associés de sociétés civiles au passif fiscal est tout à la fois indéfinie, proportionnelle et conjointe, ainsi que subsidiaire. Le code civil dispose que toutes les actions contre les associés non liquidateurs se prescrivent par cinq ans à compter de la publication de la dissolution de la société (C. civ., art. 1857, C. civ., art. 1858 et C. civ., art. 1859).
550
Le délai de reprise est interrompu à l'égard de tous les débiteurs par l'AMR adressé à la société civile, débitrice principale. L'AMR ultérieurement notifié à un associé ne produit pas d'effet interruptif.
L'acte interruptif dirigé contre la société produit ses effets à l'égard de l'ensemble des coobligés. L'acte interruptif dirigé contre un associé ne produit pas d'effet à l'égard des autres associés (pas d'obligation solidaire entre les associés mais obligation conjointe). Il aura néanmoins un effet interruptif à l'égard de la société à hauteur de la part de l'associé dans la dette de la société.
560
La suspension de la prescription à l'égard de la société civile en raison de l'ouverture d'une procédure collective ne joue à l'égard des associés que si le comptable est empêché d'agir contre ces derniers.
C. Sociétés en nom collectif (SNC)
570
L'obligation des associés au passif fiscal d'une SNC est tout à la fois indéfinie, solidaire et subsidiaire.
Le délai de prescription de l'action à l'égard des associés est de cinq ans à compter de la publication de la dissolution de la société au registre du commerce et des sociétés en application de l'article L. 237-13 du C. com..
Le délai de reprise est interrompu à l'égard de tous les associés par l'AMR adressé à la société, débitrice principale. Comme pour les sociétés civiles, l'AMR ultérieurement notifié à un associé ne produit pas d'effet interruptif.
L'acte interruptif dirigé contre la société produit ses effets à l'égard de l'ensemble des coobligés. L'acte interruptif dirigé contre un associé produit effet à l'égard de la société et des autres associés (obligation solidaire).
D. Les condamnations solidaires des dirigeants
580
L’action prévue par l’article L. 267 du LPF est une action à caractère civil d’ordre patrimonial qui vise à obtenir la condamnation du dirigeant au paiement solidaire des impositions dues par la personne morale quand certaines conditions sont remplies.
Les dispositions de l’article 2245 du C. civ. qui prévoient que l'interpellation faite à l'un des débiteurs solidaires par une demande en justice ou par un acte d'exécution forcée ou la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription contre tous les autres, mêmes contre leurs héritiers sont inapplicables avant l'intervention du jugement de solidarité.
Par deux décisions du 31 octobre 2006, (Cass. com., n° 04-15497 et Cass. com., n° 04-15720), la chambre commerciale de la Cour de cassation a ainsi considéré que la responsabilité solidaire n’étant pas de droit mais devant être prononcée par le juge, l’interruption ou la suspension de l’action ouverte à l’encontre du dirigeant (sursis à statuer afin de faire trancher le litige d’assiette par la juridiction administrative) en vue du prononcé de celle-ci est sans effet sur la prescription de l’action en recouvrement à l’encontre de la société.
Dès lors, l’assignation du dirigeant, des paiements faits par le dirigeant ou la notification à ce dernier de mesures conservatoires prises sur son patrimoine lors de l’assignation n’ont pas d’effet interruptif sur la prescription de l’action en recouvrement à l’encontre de la société. La doctrine administrative a été rapportée sur ce point.
Le principe de la solidarité du dirigeant doit donc être établi par une décision de justice avant que la créance fiscale à l’encontre de la société ne soit prescrite.
Dans un cadre différent, les plaintes pour fraude fiscale déposées par l’administration sur le fondement de l’article 1741 du CGI visent, à travers la condamnation de l’auteur du délit à une peine de prison et à une amende, à réprimer une infraction. L’article 1745 du CGI prévoit la condamnation du dirigeant au paiement solidaire des impôts fraudés par la société.
La décision du juge répressif qui condamne un dirigeant au paiement solidaire des impôts en cause interrompt la prescription de l’action en recouvrement. En revanche, les actes de procédure judiciaire intervenus avant que cette solidarité ne soit prononcée, qui ne visent que le prévenu, sont sans incidence sur la prescription des impôts dus par la personne morale (CE, 9e et 10e s.s., décision du 6 juin 2007, n° 282629 et CE, 9e et 10e s.s., décision du 6 juin 2007, n° 282631).
La solidarité prononcée sur le fondement de l’article 1745 du CGI est de nature pénale selon la jurisprudence de la chambre criminelle mais concerne une créance fiscale. Cela implique que :
- toutes les voies de recours (y compris le pourvoi en cassation) sont suspensives d’exécution ;
- toutefois, le caractère pénal de la condamnation ne s’applique pas au régime de recouvrement de l’impôt fraudé et l’administration se voit opposer au regard du principe de solidarité le délai de prescription de la créance fiscale de quatre ans.
Bien que constituant une peine à caractère pénal, la solidarité au paiement se rattache à la nature des créances qui demeurent fiscales, et qui par conséquent conservent leur caractère privilégié. En vertu de l'article L. 262 du LPF, la saisie administrative à tiers détenteur peut être utilisée pour obtenir le paiement de cette créance.