CF - Infractions et sanctions - Mise en œuvre des pénalités fiscales - Application et motivation des sanctions fiscales
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En application de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public , toutes les sanctions fiscales doivent être motivées.
L'obligation de motivation ne s'applique pas à l'intérêt de retard, qui ne constitue pas une sanction mais la réparation pécuniaire du préjudice subi par l' Etat (CE, arrêts du 9 novembre 1988, n° 68965 et du 25 octobre 1989, n° 64737). Il est toutefois rappelé qu'il est recommandé d'informer le contribuable de son application. En toute hypothèse, l'intérêt de retard doit figurer dans les propositions de rectification lorsque l'article L. 48 du livre des procédures fiscales (LPF) trouve à s'appliquer.
Bien entendu, aucune motivation n'a lieu d'être effectuée lorsque les pénalités ne sont pas applicables en raison de la tolérance définie au 3 et 4 du II de l'article 1727 du code général des impôts (CGI).
Seront examinées successivement ici :
- les conditions dans lesquelles a lieu la motivation ;
- la portée de l'obligation de motivation ;
- le visa du document de motivation des pénalités pour manquement délibéré par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire.
I. Conditions dans lesquelles a lieu la motivation
A. Principes généraux
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L'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 a fixé les conditions de forme essentielles auxquelles doit obéir la motivation : celle-ci doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision.
La qualification des pénalités s'effectue rectification par rectification. Ainsi, le document qui comporte la motivation doit comporter, rectification par rectification, d'une part le fondement légal de la sanction, d'autre part les considérations de fait, et, en particulier, l'existence et la nature exacte des infractions commises par le contribuable qui justifient l'application de la sanction.
Les conditions dans lesquelles s'effectue l'obligation de motivation sont fixées par l'article L. 80 D du LPF . Il dispose que celles-ci ne peuvent être prononcées avant l'expiration d'un délai de trente jours, éventuellement prorogé (cf. I-B § 60 et suivants), à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contribuable ou redevable concerné la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations.
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Lorsque l'article L. 48 du LPF trouve à s'appliquer, la motivation des pénalités s'effectue dans la proposition de rectification qui doit comporter leur nature ainsi que les motifs de droit et de fait qui justifient leur application.
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Enfin, l'article L. 80 E du LPF prévoit que la décision d'appliquer les majorations prévues à l'article 1729 du CGI (majoration pour manquement délibéré, manœuvres frauduleuses, abus de droit ou dissimulation de prix), à l'article 1732 du CGI (opposition à contrôle) et à l'article 1735 ter du CGI (mise en œuvre de l'article L. 13 AA, III du LPF et de l'article L. 13 AB, II du LPF) est prise par un agent de catégorie A détenant au moins un grade fixé par décret, qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités. En vertu de l'article R. 80 E-1 du LPF, ce grade est celui d'inspecteur divisionnaire.
Le visa de l'agent ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire est requis non seulement sur le document initial de motivation des pénalités mais également sur tout document qui, avant leur mise en recouvrement et pour quelque motif que ce soit, modifie la base légale, la qualification ou les motifs des pénalités (CE, arrêt du 6 avril 2007 n° 269402).
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La motivation des sanctions fiscales appliquées dans le cadre d'une procédure de rectification doit être assurée par l'agent qui a mené cette procédure.
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En droit le directeur conserve la possibilité de modifier jusqu'à la mise en recouvrement la nature des pénalités proposées par le service. Bien entendu, cette faculté est utilisée avec discernement.
Un accord intervenu à l'issue d'une vérification ne saurait avoir pour effet de priver l'administration du droit de réclamer les pénalités légalement exigibles. Le pouvoir de décision en cette matière appartient au seul directeur (CE, arrêt du 26 mai 1967 n° 64854) qui, le cas échéant adressera au contribuable une nouvelle lettre de motivation.
B. Application du délai de trente jours
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Toutes les sanctions fiscales prononcées par les services de la direction générale des finances publiques doivent donner lieu à une information préalable du contribuable, quels que soient leur nature, leur objet ou leur dénomination : majorations, amendes.
En revanche, l'obligation d'information préalable ne s'applique pas à l'intérêt de retard, dès lors que celui-ci ne constitue pas une sanction mais la réparation du préjudice subi par le Trésor du fait de l'encaissement tardif de l'impôt.
Chaque fois qu'elle envisage de prononcer une sanction, l'administration doit adresser au contribuable un document lui faisant connaître :
- la sanction qu'elle se propose de lui appliquer ;
- les motifs de la sanction ;
- la possibilité dont il dispose de présenter ses observations dans un délai de trente jours.
La sanction ne peut être prononcée avant l'expiration de ce délai de trente jours.
1. Portée du délai de trente jours
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L'obligation d'accorder au contribuable un délai de trente jours a pour but de lui permettre de présenter ses observations avant la mise en recouvrement.
L'ouverture de ce délai n'entraîne pas pour autant l'engagement d'une procédure contradictoire. En conséquence, les observations présentées par le contribuable seront bien entendu prises en compte si elles sont fondées, mais l'administration n'est pas tenue de répondre. Dès lors, les pénalités peuvent être mises en recouvrement dès l'expiration du délai de trente jours. Toutefois, lorsque les observations du contribuable conduisent l'administration à requalifier la nature des pénalités (par exemple substituer le manquement délibéré à la bonne foi) ou à modifier leur fondement légal (substituer les pénalités pour défaut de déclaration à celles de manquement délibéré), une nouvelle motivation doit être effectuée et un nouveau délai de trente jours doit être respecté.
Le délai de trente jours court à compter du lendemain de la réception ou du retrait à la poste du document contenant la motivation. À défaut de retrait dans le délai d'instance de quinze jours prévu par la réglementation postale, le délai court à compter du lendemain de la présentation au domicile du contribuable absent.
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Lorsque le contribuable bénéficie du délai prorogé pour répondre aux rectifications proposées par le service (LPF, art.L. 57, al 2, et BOI-CF-IOR-10-50 au II-A § 200 et suivants), il dispose de ce même délai pour présenter ses observations sur les sanctions motivées dans la même proposition de rectification.
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En revanche, lorsque des sanctions fiscales sont motivées séparément, elles continuent de relever des dispositions du seul article L. 80 D du LPF qui ouvre un délai de trente jours pour présenter ses observations.
C. Modalités pratiques
1. Pénalités appliquées dans le cadre d'une procédure de rectification
a. Modalités générales
1° Procédure consécutive à un contrôle externe
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L'article L. 48 du LPF est applicable aux rehaussements notifiés à la suite d'un contrôle externe quelle que soit la procédure utilisée.
Lorsque ces dispositions sont applicables, l'administration indique au contribuable, dans la proposition de rectifications, les conséquences financières (droits et pénalités) des rehaussements notifiés.
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À cette occasion, les pénalités exclusives de bonne foi, appliquées par décision d'un agent ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire, sont motivées dans la proposition de rectification. Le contribuable dispose alors du délai de trente jours, éventuellement prorogé, visé à l'article R*. 57-1 du LPF pour présenter des observations tant sur les droits que sur les pénalités.
En application du dernier alinéa de l'article L. 57 du LPF, l'administration doit répondre à ses observations en ce qui concerne les droits. Mais elle n'est pas tenue de le faire pour les pénalités.
2° Procédure consécutive à un contrôle sur pièces
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L'article L. 48 du LPF n'est pas applicable aux rehaussements notifiés à la suite d'un contrôle sur pièces, quelle que soit la procédure d'imposition suivie.
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En cas de procédure de rectification contradictoire conduite en contrôle sur pièces, la motivation des sanctions est, en principe, effectuée dans la proposition de rectification.
Toutefois, le service dispose également de la faculté de faire figurer les pénalités dans une lettre de motivation spécifique.
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Lorsqu'une procédure d'imposition d'office est mise en œuvre, la motivation des sanctions fiscales est effectuée dans la proposition de rectification ou à défaut dans une lettre de motivation adressée au contribuable (cf. modèle pour exemple au BOI-LETTRE-000228).
Dans tous les cas, il convient de s'assurer du respect de l'obligation de laisser courir un délai de trente jours avant la mise en recouvrement (cf. I-B § 60 et suivants).
b. Cas particuliers
1° Droits d'enregistrement
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En matière de droits d'enregistrement et taxes assimilées, compte tenu de la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass. Com. , arrêt du 28 janvier 1992, n° 89-19385, Bulletin 1992 IV N° 42 p. 33), il est préconisé de motiver les pénalités notifiées dans le cadre d'une procédure de rectification contradictoire dans la proposition de rectification elle-même, qu'il s'agisse d'un contrôle externe ou sur pièces.
Dans cette hypothèse, il n'est pas nécessaire d'adresser une lettre spécifique de motivation des pénalités avant la mise en recouvrement des impositions.
2° Pénalités pour défaut de désignation des bénéficiaires de distributions occultes
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Lorsqu'en application de l'article 117 du CGI, une société a été invitée à désigner les bénéficiaires des distributions résultant de la vérification et qu'elle s'est abstenue de répondre à l'expiration du délai de trente jours fixé par cet article, l'administration peut l'assujettir à la pénalité prévue par l'article 1759 du CGI.
En application de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, cette pénalité doit faire l'objet d'une motivation spécifique après réalisation de son fait générateur (c'est-à-dire l'expiration du délai de trente jours imparti à la société pour répondre) et avant mise en recouvrement (CAA Paris, arrêt du 18 juillet 1991, n° 89PA02247).
La lettre de motivation doit donc mentionner l'article 117 du CGI et l'article 1759 du CGI, faire référence à la proposition de rectification dans laquelle figure la demande de désignation des bénéficiaires et constater l'absence de réponse à l'expiration du délai de trente jours à compter de la réception de la proposition.
La mise en recouvrement doit intervenir au moins trente jours après la motivation en application de l'article L. 80 D du LPF.
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Cependant, et pour donner son plein effet à la mesure qui permet au contribuable de solliciter la prorogation pour répondre aux rectifications qualifiées de revenus distribués, ce dernier pourra disposer de cette prorogation pour désigner les bénéficiaires de ces distributions (cf. I-B-1 § 70 et suivants).
3° Défaut ou insuffisance de déclaration de commissions, courtages ou honoraires versés à des tiers
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La réintégration des sommes non déclarées, prévue par le 1 de l'article 240 du CGI, constitue une sanction qui est motivée dans la proposition de rectification par le non-respect des obligations déclaratives. Par suite, elle n'a pas à faire l'objet d'une nouvelle motivation au titre des pénalités fiscales.
4° Réintégration ou imposition des sommes dues ou payées à des personnes résidant à l'étranger
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La réintégration ou l'imposition des sommes dues ou payées à des personnes résidant à l'étranger (CGI, art. 155 A et CGI, art. 238 A) ne constituent pas des pénalités fiscales. Il s'agit de rehaussements qui résultent de l'application d'un texte législatif. Ils n'ont donc pas à faire l'objet d'une motivation au titre des pénalités.
5° Affaires soumises à la commission départementale ou nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires commission départementale de conciliation
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Dans l'hypothèse où, à la suite de l'avis formulé par la commission et porté à la connaissance de l'intéressé, des modifications affecteraient la nature des pénalités initialement appliquées, il y aura lieu de lui adresser, par courrier recommandé avec avis de réception, une lettre portant motivation des pénalités finalement retenues.
2. Pénalités appliquées en dehors de toute procédure de rectification
a. Majorations pour dépôt tardif de déclaration
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En cas d'imposition consécutive au dépôt hors délai d'une déclaration, avec ou sans mise en demeure et sans modification des bases déclarées, l'information préalable prévue par l'article L. 80 D du LPF est effectuée selon les modalités indiquées au I-B § 60 et suivants (un modèle pour exemple est fourni au BOI-LETTRE-000228.
Remarque : Le BOI-ANNX-000282 fournit une liste non exhaustive des principales sources légales prévoyant le dépôt à échéance de certaines déclarations.
b. Pénalités appliquées à raison d'infractions constatées par procès-verbal
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Lors de la déclaration de procès-verbal qui doit intervenir dans le délai prévu au deuxième alinéa de l'article L. 188 du LPF, l'agent verbalisant doit indiquer au contrevenant les sanctions légalement encourues.
Le procès-verbal rédigé ultérieurement doit mentionner, en les motivant, les pénalités appliquées.
Une copie du procès-verbal est remise au contrevenant.
Lorsque ce dernier n'assiste pas à sa rédaction ou refuse d'en prendre possession, une copie lui est adressée par courrier recommandé avec avis de réception.
La mise en recouvrement ne peut intervenir qu'au moins trente jours après la motivation (cf. I-B § 60 et suivants).
c. Autres pénalités
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Il s'agit des pénalités fixes pour défaut ou retard de production ou inexactitude d'un document (CGI, art. 1729 B), de l'amende de 5 % ou 1 % pour absence de production ou omissions sur le tableau des provisions et sur le relevé des frais généraux (CGI, art. 1763, I).
Il s'agit également de sanctions particulières prévues par le CGI (CGI, art.1734, 1735, 1736, 1737, 1739, 1740 A, 1757, 1763, etc.).
La motivation de ces pénalités est portée à la connaissance du contribuable au moyen d'une lettre envoyée avec accusé de réception, adaptée à chaque cas particulier.
Leur mise en recouvrement ne peut intervenir moins de trente jours après la lettre de motivation, en application de l'article L. 80 D du LPF (cf. I-B § 60 et suivants).
II. Portée de l'obligation de motiver les sanctions fiscales : solutions jurisprudentielles
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Toutes les sanctions fiscales mises en recouvrement après l'entrée en vigueur de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, c'est-à-dire le 11 janvier 1980 doivent être motivées (CAA Paris, 21 mai 1991, n°s 845 - 846 et CAA Nancy, arrêt du 9 juillet 1991, n° 89NC0484).
À défaut, la procédure est irrégulière et le juge prononce la décharge des majorations et amendes en leur substituant cependant les intérêts de retard (CE, arrêts des 22 février 1989, n° 70252 et 11 avril 2001, n° 175082 ; CAA Lyon, arrêt du 28 décembre 1990, n° 89LY01778 ; CAA Nancy, arrêts du 2 avril 1991, n°s 89NC00817 et 89NC00818 et 9 juillet 1991, n° 89NC00484 ; CAA Paris, arrêt du 21 mai 1991, n° 845-846).
La charge de la preuve de la motivation appartient à l'administration (CE, arrêts des 21 avril 1989, n° 89657 et 1er mars 2001, n° 181665 et CAA Paris, 18 juillet 1991, n° 90PA00311).
L'administration n'est pas tenue de suivre une procédure contradictoire.
Ce principe résulte d'une jurisprudence constante (CE, arrêts du 27 avril 1979, n° 7309, du 16 février 1987, n° 50421 ; CAA Nantes, arrêt du 8 juin 1990, n° 89NT00441 et 3 juillet 1991, n°s 89NT00879 et 89NT00880 ; CAA Paris, arrêt du 16 octobre 1990, n° 1983 et 12 mars 1991, n° 89PA02129 ; CAA Lyon, arrêt du 12 juin 1991, n° 89LY01509 ; CAA Nancy, 25 juin 1991, n° 89NC01027 en ce qui concerne l'amende visée à l'ancien article 1740 ter du CGI devenu 1737 I, 1 à 3 du CGI).
En effet, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à l'administration de suivre une procédure contradictoire pour l'établissement des pénalités.
Par ailleurs, la motivation des pénalités doit s'effectuer en droit et en fait.
La lettre de motivation des pénalités doit comporter :
- le fondement légal de la sanction ;
- les considérations de fait et, en particulier, l'existence et la nature exacte des infractions commises par le contribuable qui justifient l'application de la sanction, pour chaque année d'imposition : non-dépôt de la déclaration, éléments démontrant le manquement délibéré, irrégularités de la comptabilité.(CAA Lyon, arrêt du 28 novembre 1990, n° 89LY00545 ; CAA Paris, arrêt du 27 mars 1990, n° 89PA00879 ; CAA Nantes, arrêt du 3 juillet 1991, n° 89NT00732).
Aussi, une lettre qui se borne à indiquer qu'il sera fait application, pour des omissions de recettes, des majorations prévues en l'absence de bonne foi est insuffisamment motivée pour retracer les circonstances de droit et de fait justifiant l'application de la sanction (CAA Nancy, arrêt du 9 avril 1991, n° 89NC00798).
De même, une lettre de motivation qui ne précise pas les années concernées ni les infractions commises est insuffisamment motivée même si elle se réfère à la proposition de rectification (CAA Bordeaux, arrêt du 18 décembre 1990, n° 89BX01092).
La motivation ne peut intervenir qu'après constatation de l'infraction qui justifie la sanction.
Aussi, ne constituent pas une motivation des pénalités :
- les mises en demeure d'avoir à déposer des déclarations (CE, arrêts du 21 avril 1989 n° 89657 et du 6 juillet 1990, n° 81002 ; CAA Lyon, arrêt du 14 mars 1991, n° 89LY00906) ;
- la seule constatation dans la proposition de rectification du non-dépôt des déclarations, sans exposé des motifs conduisant à l'application d'une procédure d'office (CE, arrêt du 21 avril 1989, n° 89657 et CAA Lyon, arrêt du 14 mars 1991, n° 89LY00906).
La lettre de motivation des pénalités (CE, arrêts du 15 janvier 1992, n° 85915 ; CAA Paris, arrêt du 27 décembre 1990, n° s 790 et 1124 et 30 avril 1991, n° 89PA02664) ou la réponse aux observations du contribuable qui contient cette motivation (CAA Nantes, arrêt du 28 novembre 1990 n° 89NT00744) interrompt la prescription.
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L'article 6 de la convention européenne des droits de l'Homme est applicable aux sanctions fiscales, mais il ne concerne que les procédures contentieuses.
Dans le cadre de la procédure prévue à l'article 12 de la loi no 87-1127 du 31 décembre 1987, le Conseil d'État, saisi de questions portant sur l'applicabilité en matière fiscale, de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme et du principe du contradictoire, le Conseil d'État a rendu l'avis suivant.
Par deux arrêts (CAA Lyon , arrêts du 20 décembre 1994 n° 92LY00847 et 92LY00848), la Cour d'appel administrative de Lyon avait posé la question de savoir :
- si les pénalités pour manœuvres frauduleuses sont assimilables à des condamnations pénales au sens de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- dans l'affirmative, quelle est la portée des dispositions de l'article 6, paragraphe 2, de ladite convention sur les conditions d'élaboration, de prononcé et de contestation des dites sanctions.
Le Conseil d'État a rendu l'avis suivant :
« Aux termes de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ratifiée par la France en vertu de la loi n° 73-1227 du 31 décembre 1973 et publiée au journal officiel par décret n° 74 360 du 3 mai 1974 : « 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue... équitablement... par un tribunal qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle... 2. Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie. 3. Tout accusé a droit notamment à : a) être informé, dans le plus court délai,... de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui ; b) de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense... » ;
Il résulte du texte même de cet article que l'ensemble de ses stipulations n'est applicable qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions lorsqu'elles statuent sur des droits et obligations de caractère civil ou sur des accusations en matière pénale. Notamment, le paragraphe 2 dudit article qui, énonçant en matière pénale le principe de présomption d'innocence, concerne les règles d'instruction et de preuve applicables devant les juridictions, se borne à préciser les modalités de contestation, devant ces dernières, des accusations en matière pénale.
Il suit de là que l'article 6 précité n'énonce, y compris dans son paragraphe 2, aucune règle ou aucun principe dont le champ d'application s'étendrait au-delà des procédures contentieuses suivies devant les juridictions, et qui gouvernerait l'élaboration ou le prononcé de sanctions, quelle que soit la nature de celles-ci, par les autorités administratives qui en sont chargées par la loi.
Les principes que fixe ledit article 6 sont en revanche applicables à la contestation, devant les juridictions compétentes, des majorations d'impositions prévues au 1 de l'article 1729 du code général des impôts en cas de manœuvres frauduleuses qui, dès lors qu'elles présentent le caractère d'une punition tendant à empêcher la réitération des agissements qu'elles visent et n'ont pas pour objet la seule réparation pécuniaire d'un préjudice, constituent, même si le législateur a laissé le soin de les établir et de les prononcer à l'autorité administrative, des « accusations en matière pénale » au sens des stipulations de l'article 6 précité ».
III. Visa du document de motivation de certaines pénalités par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire
A. Sanctions visées
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Ce sont les majorations qui sont appliquées lorsque des infractions constatées, dans le cadre du contrôle sur pièces ou du contrôle externe, ont été commises par manquement délibéré ou sont constitutives de manœuvres frauduleuses.
Il s'agit de celles prévues par l'article 1729 du CGI et l'article 1732 du CGI, à savoir les pénalités de 40 % pour manquement délibéré, de 80 % pour manœuvres frauduleuses et abus de droit et de 100 % en cas de mise en œuvre de la procédure d'évaluation d'office pour opposition à contrôle fiscal qui sont applicables en sus de l'intérêt de retard.
Est également concernée, l'amende prévue à l'article 1735 ter du CGI pour défaut de réponse ou réponse partielle à la mise en demeure mentionnée au III de l'article L. 13 AA du LPF et au deuxième alinéa de l'article L. 13 AB du LPF.
B. Sanctions non visées
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Les documents portant exclusivement motivation des pénalités non visées à l'article L. 80 E du LPF ne sont pas soumis au visa d'un agent ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire. Il s'agit notamment des pénalités applicables en cas de bonne foi, des majorations pour retard ou défaut de déclaration (CGI, art.1728), de la pénalité visée à l'article 1759 du CGI.
C. Visa du document de motivation des pénalités
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Ce document est constitué, selon les cas, par la proposition de rectification (LPF, art.L. 48), la réponse aux observations du contribuable ou par une lettre spéciale (cf. I-B-1 § 70 et suivants).
Il est précisé que le visa de l'agent ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire est requis non seulement sur le document initial de motivation des pénalités mais également sur tout document qui, avant leur mise en recouvrement et pour quelque motif que ce soit, modifie la base légale, la qualification ou les motifs des pénalités (CE, arrêt du 6 avril 2007, n° 269 402 ).
La décision d'appliquer les sanctions concernées est matérialisée par l'apposition du nom et de la signature de l'agent ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire sur l'un des documents mentionnés ci-dessus.
Dès lors qu'il s'agit d'un visa, le nom et la signature de l'agent qui effectue le redressement doivent être également apposés sur ce document.